Une psychanalyse superficielle
Après deux films, un excellent (A History of Violence) et un autre moindre mais tout du moins réussi (Les promesses de l'ombre), touchant de près l'univers des mafieux, David Cronenberg se tourne vers la psychanalyse en adaptant un livre et une pièce de théâtre. Connaissant le style de Cronenberg, on pouvait s'attendre à des délires visuelles pour illustrer la folie des personnages mais pas du tout, au contraire même. Le réalisateur s'attache à conserver un style visuel pur, non disons plutôt classique sans jeu de lumière comme ses deux précédents films où le contraste était très important.
La seule trace de folie réside dans le jeu de Keira qui m'a, pour une fois, soufflé. J'ai toujours eu beaucoup de mal avec elle mais sa prestation dans A Dangerous Method est très bonne. L'actrice illustre, avec une exubérance qu'on ne lui connaissait pas, la folie de son personnage même s'il est parfois difficile de ne pas rire nerveusement devant tant d'outrance. Et c'est vraiment un des rares points forts du film, le reste n'étant que passablement peu intéressant.
Si on est salaud, on pourrait résumer l'histoire à deux cons qui s'engueulent pour savoir qui a la plus grosse. Leurs échanges se résumant au fur et à mesure qu'on avance dans le film à des débats stériles pour savoir qui a raison, la lutte des égos dépassant le véritable objectif: faire avancer la médecine. Comédiens campant les personnages, Fassbender et Mortensen joue de façon juste mais malheureusement sont au final limités par le scénario un brin emmerdant.
Ce qui est vraiment dommage car on sentait qu'il y avait moyen de nous pondre un bon scénario mais les évènemelnts sont peu approfondis et rapidement survolés, des ellipses de plusieurs années surviennent assez souvent. Un défaut souvent typique des films historiques qui, comme stressés par l'énorme laps de temps qui leur est impartis et par la peur d'emmerder le public, essaient de condenser un maximum l'ensemble des informations au point d'en perdre l'essence. Il aurait peut-être mieux fallu pour le bien de l'histoire, de davantage s'attacher à l'essence des personnages au lieu de passer l'un à l'autre sans véritablement donner l'impression de les connaître.
Ce qui est un deuxième défaut de ces films historiques : par crainte, de dénaturer la réalité, ils ont tendance à n'afficher que ce qui a été avéré or il devient plus dur de s'attacher à des personnages qui sont au final caricaturés car n'est-ce pas le défaut de l'Histoire avec un grand H, ne retenir que les évènements majeurs sans s'attarder plus que ça, ne retenir que la vision des vainqueurs, de ceux qui écrivent l'Histoire. De Napoléon, on ne retiendra que sa soif de conquête, de Charles Martel sa capacité à avoir arrêté la conquête musulmane à Poitiers. Mais qui sera réellement capable de connaître leurs pensées les plus profondes? Car après tout, les vies passent, seules les légendes restent. Mais là, je vais un peu trop loin. Tout ça pour dire qu'on regrettera des personnages (mis à part celui de Keira) un peu trop superficiels pour qu'on s'y intéresse véritablement.
L'autre déception du film concerne la réalisation de Cronenberg qu'on avait connu bien plus inspiré. Il s'y contente de poser la caméra et de laisser faire, craignant sans doute de trop prendre le pas sur l'histoire authentique mais étant donné que cette dernière est bien loin d'être folichonne, il aurait peut-être mieux fallu secouer un peu la termitière pour voir ce qui en ressort.
La prestation de Vincent Cassel est presque anecdotique, ne servant que de catalyseur pour faire avancer l'histoire en stimulant l'appétit sexuel du héros.
Conclusion :
La déception du mois. Le nouveau Cronenberg est bizarrement très pudique et mal desservi par son scénario presque tout sauf intéressant. Il ne reste plus qu'à signaler la bonne prestation de Keira (et c'est un de ses détracteurs qui parle).