A Day in the Life
A Day in the Life

Documentaire TV de John Krish (2010)

Panorama de l'Angleterre d'après-guerre.

Disparu en 2016, John Krish a certes réalisé quelques longs-métrages, mais il était davantage connu pour ses films institutionnels qui ont fait date non seulement pour leur qualité technique, leur réalisation, la justesse du ton, mais aussi parce qu'il captait parfaitement l'atmosphère du pays au sortir de la guerre et sa reconstruction, éducative en particulier. J'en parlerais plus tard, mais un de ces films a tant marqué l'opinion que la BFI, l'équivalent anglaise de la Cinémathèque, a restauré et compilé quatre de ses courts-métrages (de 10 à 26 minutes et sortis de 1953 à 1964) pour en faire un film sorti en 2010 et qui a eu un certain succès critique ainsi que commercial en Angleterre.



  • The elephant will never forget : le plus connu d'entre tous, il s'agit d'un très bel hommage au tramway londonien, qui s'apprête à rouler pour la dernière fois, et on suit la dernière journée d'un conducteur, tout en traversant des paysages encore ravagés par le Blitz, et avec comme contre-champ un couple de personnes âgées, qui représente eux aussi une fin en soi. D'ailleurs, le dernier retour du tramway dans sa gare est ponctuée de hourras et où les gens, nombreux, chantent la version anglaise de Ce n'est qu'un au revoir.


  • They took us to the sea : durant une journée, on suit des enfants défavorisés d'une école de Birmingham découvrir la mer via une station balnéaire au sud du pays. On voit l'attente, l'impatience même, car pour la plupart ils ne sont jamais sortis de leur ville, et on voit ça par des scènes amusantes dans le train qui les emmène où on voit la surprise de certains d'entre eux d'être dans un tel véhicule.


  • Our school : on suit des élèves dans une école mixte, regroupant à la fois garçons et filles, ainsi que la primaire et le collège. Il y a quelques cours qui sont données, avec les tâches réparties de manière spécifique pour les matières plus actives (les filles apprennent à faire le ménage et les garçons à réparer des machines), avec tout un passage très intéressant où une professeure interroge ses élèves sur ce qu'ils veulent faire plus tard. A part une seule fille, toutes ne veulent qu'être mère au foyer et laisser leur futur mari travailler !


  • I think they call him John : du lever à la soirée, on va suivre la journée d'un ancien soldat de la Première Guerre Mondiale, John Ronson, veuf depuis des années, sans enfant, dans un univers si morne, mais pourtant si actuel, car il ne voit personne, ni ne sort de son petit appartement...



Au-delà de la nostalgie inhérente à chacun d'entre eux, ces petits documentaires montrent une facette du pays sur une dizaine d'années. The elephant will never forget étant à ce titre assez émouvant pour les anglais, d'où sa reconnaissance à l'heure actuelle, car il s'agit clairement d'une période révolue, avec pour chacun une très bonne réalisation. On apprend dans les crédits que John Krish avait parfois jusqu'à trois directeurs de la photo, ce qui parait fou quand on y pense. Mais il y a clairement l'idée de plans parfaitement composés, qui sont clairement l’œuvre d'un cinéaste et non d'un réalisateur lambda. Qui fut par ailleurs reconnu par son pays, car il ne faut pas oublier que plusieurs de ces documentaires (les trois premiers du film par exemple) ont été commandés par le gouvernement anglais. Quelque part, on s'approche de ce que pourrait faire Frederik Wiseman, dans le sens où il y a très peu de voix-off (souvent au début et à la fin), et que la parole est libre. Mais ce point est plus important encore dans le dernier documentaire, le touchant I think they call him John, où bien entendu, cette personne âgée ne parle pas toute seule, et que, bien que les scènes semblent parfois jouées, il y a quelque chose de fondamentalement triste dans ce film-là, comme si c'était un laissé pour compte du boom économique anglais qui était présent en 1964.


Adoré par des gens comme Karel Reisz ou Kevin Bronlow (qui ont travaillé avec lui), John Krish est sans nul doute quelqu'un de passionnant, dont les films dits institutionnels ont tous quelque chose de personnel, et qui prennent une certaine patine avec le temps. Une période figée sur pellicule pour toujours.

Boubakar
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le 15 mars 2021

Critique lue 58 fois

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Boubakar

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