Malades, inadaptés à la société, déviants, opposants politiques, tous sont parqués à la même enseigne dans cet hôpital psychiatrique du Sud-Ouest de la Chine.
Des chambres collectives où dormir des jours entiers, un balcon circulaire grillagé, une salle commune où la seule attraction est une télévision cathodique témoignant de la vétusté du lieu exploré; À la folie nous plonge dans le quotidien inhumain d’individus à qui on a tout enlevé, ou presque : dignité, intimité, liberté. Reste leur (sur)vie.
Si le documentaire de par son titre français annonce une incursion dans les couloirs déments de cet asile, son titre original Fēng ài (瘋 Fou, 愛 Amour) laisse transparaître une vision plus humaniste que systémique de ce dédale psychologique. Dans cette transposition de l’enfer, il reste à ses hommes la seule valeur humaine qu’il n’est possible de leur écarter : l’amour qu’ils se portent entre eux.
D’un lit partagé à deux, aux étreintes charnelles plus ou moins appuyées et manifestations intimes, Wang Bing filme la mise à nu de ces patients, propre comme au figuré, accordant un temps et un espace à chacune de leur action spontanée, parfois irationelle.
Wang Bing, dans l’invisible à l’instar de sa caméra, restitue une force d’attention de ses sujets, les suivant dans leurs mouvements, dans l’intime, à hauteur intermédiaire, sans aucun jugement de par ses choix de mise en scène. C'est une fresque documentaire articulée autour de ses personnages, dans un contexte inhumain qui programme la folie autant qu’il la diagnostique.