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A Man
6.6
A Man

Film de Kei Ishikawa (2022)

Dans une réactualisation involontaire du roman Mémoires d’Hadrien (Marguerite Yourcenar, 1951), qui amenait l’empereur à s’interrogeait sur les différentes personnes qu’il avait été sa vie durant sans parvenir à aboutir à une seule et même identité, Aru Otoko prend la forme d’une enquête, aussi appelée « chasse à l’homme » par l’épouse du détective, pour mieux remonter la piste d’une vérité tout à la fois juridique et philosophique, quoique l’intérêt de cette première s’estompe au profit de la seconde. Car l’essentiel réside moins dans la connaissance d’un nom véritable et de la biographie associée, que dans la vérité présente dans une fausse identité, au sein de laquelle s’accomplit une résurrection perturbée çà et là de retours en arrière, des fantômes que l’on transporte avec soi et que l’on porte en soi. Le long métrage interroge et démantèle la notion de déterminisme, qu’il ancre dans un Japon fracturé en son sein par des revendications nationalistes et racistes, lui préférant la thèse du rachat par l’art et par la fiction, incarnés par les dessins des condamnés à mort et par les différentes usurpations.

Son intelligence, même si elle repose de façon quelque peu schématique sur des symboles lourdement assénés, tient alors au refus du double, poncif psychanalytique, pour lui préférer le triple, ou plutôt la médiation par un tiers présent de deux absents, séparés par la géographie ou par le statut de vivant : le détective Akira Kido circule entre trois familles, à savoir celle de Rie, qu’il connaît déjà pour s’être occupé d’un précédent divorce, celle des Taniguchi véritables et celle, enfin, dans laquelle il s’inscrit en tant que père et mari aimant. Non pas une simple binarité, mais une tripartition ouverte sur une infinité de dédoublements, à l’image du tableau qui ouvre et referme le film, capté dans un miroir.

Parfaitement interprété et rigoureusement mis en scène, Aru Otoko prône la reconquête de sa vie et d’une identité apte à la refléter, dessinant trois espaces possibles : enterrer son passé pour mieux renaître (le faux Daisuke), se raccorder in extremis à son passé (le vrai Daisuke, retrouvé par son ancienne petite-amie au restaurant), errer entre ces deux rives dans une quête (in)finie de soi.

Fêtons_le_cinéma
7

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Créée

le 16 mars 2024

Critique lue 9 fois

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