A Scene at the Sea par khms
Après s'être fait une petite renommée de réalisateur, notamment avec Violent Cop, Kitano nous emmène plus loin dans son univers, avec un film bien plus contemplatif, où on prend le temps de regarder les choses, dans toute leur beauté, ainsi que leur tristesse.
On découvre alors la vie d'un jeune éboueur sourd et muet qui a le regard perdu loin vers l'horizon, en direction de la mer. C'est alors qu'un jour durant ses heures de travail, il trouve une planche de surf cassé. Excité par sa découverte, il va la réparer lui-même et va partir avec un frêle maillot de bain sur une plage perdue, en plein milieu de la ville, pour essayer d'apprendre à surfer de lui-même.
Il pourra alors compter sur le soutien de son amie, sourde-muette également, et petit à petit vers ceux qui au début le méprisaient, telles que des petites racailles de pacotille qui essaieront d'ailleurs le surf dans des petites scènes hilarantes, mais également, une bande de surfeurs qui après l'avoir longuement regardé d'un air amusé, lui prêteront main forte.
Ce qui frappe dès les premières minutes du film, c'est le traitement de l'image, d'une lenteur extrême. Kitano prend le temps de s'attarder sur la mer, sur des éléments du décor, ou tout simplement sur le visage du héros, pris à chaque instant par la mélancolie, même quand il fait du surf. D'ailleurs, vous avez intérêt à l'aimer cet acteur, parce que vous allez en bouffer des plans fixes sur son regard au loin durant toute la durée du film !
Je tiens également à souligner la qualité de la bande-son, signée par l'illustre Joe Hisaishi, tant ses compositions variées, mélancoliques et sentant bon le vent marin contribuent à l'ambiance mélancolique du film. Pour la peine, je vous offre un lien ci-dessous afin que vous compreniez le potentiel de l'excellente musique de ce film.
Que retenir de ce film au final ? À cause de son traitement ultra-contemplatif, il sera difficile pour un néophyte dans la matière d'apprécier ce film, tout autant que le connaisseur qui pourra facilement s'ennuyer. De même, on touche au film le plus ancré dans l'univers si étrange et atypique de Kitano, pavé de mélancolie, de longueur et de beauté. Ne pas être prêt à prendre son temps pour apprécier chaque seconde qui s'écoule pourrait donc être un préjudice quant à l'appréciation de ce film.
Pour ma part, j'ai adoré voir l'évolution de l'éboueur, d'abord minable et moqué, puis apprécié et respecté. Avec son traitement réaliste, on comprend bien vite que jamais il ne sera un grand surfeur, mais j'ai fini par l'encourager du fond de mon coeur, avec la véritable envie qu'il y arrive, comme un enfant dont on aurait envie d'être fier.
Un superbe film sur la persévérance, mais également sur la difficulté de la condition des handicapés sensoriels, et même si le sujet n'est pas vraiment abordé durant le film, on s'en trouve avec une morale à faire fondre en larmes de dépit le plus résigné de nous tous, et elle est mille fois plus efficace à mon sens que bien des films où l'handicap nous est présenté comme une plaie, avec pitié. À méditer.