"Adieu les cons" navigue entre le tragique et le comique et dans son évolution, il va se montrer d’un équilibre surprenant pour mêler les tons utilisés pour raconter son histoire. Sans cesse à la frontière entre l’humour et le drame, le film trouve un équilibre parfait. Cet équilibre se forme avec la présence d’un fil dramatique présent dès le début de l’histoire, un fil qui est également parfaitement tendu. L’émotion n’envahit jamais l’histoire, notamment par le fait que le film place son humour minutieusement, tout au long de son déroulement. Sans être un défaut, au contraire, on ne sait jamais si le film est une odyssée sérieuse ou dramatique. De toute évidence, elle est les deux. Sans tomber dans le larmoyant, le côté émotionnel du film est dosé avec justesse. D’un autre côté, le film décroche des rires à maintes reprises, avec facilité.
Le long-métrage pose un pied dans l’imaginaire de Dupontel, l’autre dans la réalité. La rencontre entre les deux donne ce regard que porte le cinéaste sur la société et ne se prive pas de s’en moquer, avec un humour qui fonctionne à chaque instant. Dupontel conserve aussi l’utilisation de l’absurde avec une maîtrise toujours mesurée et imparable, appliquée autant au niveau du fond, les idées rattachées les unes aux autres forment une épopée qui l’est totalement, que de la forme.
Albert Dupontel va au bout de ses idées et laisse parler son imagination pour diriger sa caméra. Son utilisation stylistique permet une vraie inventivité technique comme visuelle, notamment avec l’utilisation des effets spéciaux, et par des idées simples, il donne un vrai charme à son œuvre, secondée par une photographie très marquée, qui structure l’image. Il y a une vraie harmonie entre les plans et leur construction, Dupontel est un grand faiseur.
Cette quête fataliste, en même temps existentialiste, déborde d’idées dès les premiers plans. C’est un démarrage fort, une force qui ne cessera d’être présente, imagée par la suite par une explosion de sentiments, notamment dans sa deuxième partie. Une courte durée, pourtant un rythme hyper-vitaminé qui a le droit, malgré tout, à des moments de repos, laissent se construire derrière ces éléments et bien d’autres encore qui forment une palette riche d’inventivité, une épopée passionnante et qui fait un bien fou. Pourtant, c’est un film qui touche profondément par son dramatisme, un film qui n’est en rien un moment de légèreté et pourtant, il parvient à créer des moments qui le sont. C’est ce qui donne un équilibre tout à fait remarquable au film, il puisse sa force dans sa maîtrise globale, jusqu’à cette fin brutale et inattendue mais logique finalement.
"Adieu les cons" c’est aussi trois personnages avec des identités bien marquées, différentes mais qui se complètent, et à la composition particulière ce qui les rend presque haut en couleur. Chacun de ces protagonistes, au même titre que leur interprète, apportent leur pièce à l’édifice. Sur le fondement de ces personnages, le film développe son propos. Leur écriture si juste permet à nous spectateur, de s’y attacher. Leur odyssée n’est que plus plaisante à suivre. Le trio est marqué par un grand Dupontel, qui comprend parfaitement son personnage c’est un évidence, et il lui donne un palette d’émotions assez large. Nicolas Marié est ce troisième personnage, attachant et déconnecté. Il interprète à merveille ce dernier. Au milieu du trio, il y a Virginie Efira, qui brille du début à la fin. L’actrice est fabuleuse et transmet l’émotion avec tant de facilité. Elle livre une remarquable interprétation de son personnage.
"Adieu les cons" fait passer le spectateur du rire aux larmes avec facilité. Habilement, la tournure scénaristique permet aussi bien à Dupontel de dire ce qu’il a dans le cœur tout en donnant sa vision de la société, sans tomber dans le pamphlet trop excessif. Le cinéaste invoque un cinéma artisanal, où les artifices sont maîtrisés et inventifs pour mieux faire fonctionner toute cette machinerie savoureusement mise en place. Albert Dupontel se réinvente pour signer une réalisation forte, une audacieuse aventure comme on aimerait voir plus souvent dans le cinéma français actuel.
9/10