C’est l’histoire d’une coiffeuse cancéreuse, d’un informaticien suicidaire et d’un archiviste aveuglé par la police. Adieu les cons sonne comme une blague cruelle : c’est exactement ce que c’est. Non pas qu’Albert Dupontel mêle habilement humour et tragique, mais plutôt que les deux se nourrissent mutuellement. Nicolas Marié, en aveugle serviable mais toujours à contre-temps, apporte notamment une dose de slapstick bien sentie à une écriture fusante, toujours en mouvement.
Apologie de l’outsider, comme l’était déjà la déflagration Bernie (1996), Adieu les cons montre comme son auteur s’est assagi : finies les effusions de sang, les marginaux sont rangés, insignifiants. Portraits, donc, de trois monsieur et madame tout-un-chacun, en butte à l’horreur quotidienne et qui construisent le temps d’un film un monde à leur échelle. Pas étonnant que Dupontel ait tourné, bien avant tout confinement, la majeure partie du film en studios. C’est bien une chambre à soi qu’il bâtit à coups de caméra virevoltante et de lumières sépia (vous avez dit Jean-Pierre Jeunet ?).
Acteur pour Bertrand Blier, dans le Bruit des glaçons en 2010, le réalisateur-interprète lui emprunte sa fantaisie désespérante, et ses récits boiteux, foisonnants, riches de sous-intrications : ici, la séquence en plein cœur du film, d’un médecin amnésique (Jackie Berroyer) recouvrant partiellement sa mémoire. Touché, plein cœur.
On pourra se sentir à l’écart du déluge mélodramatique des dernières séquences, ou plonger pleine bille, et pleurer autant qu’on a ri. Une chose est sûre : Virginie Efira, sublimement pudique, évite au film quelques fausses teintes, et lui permet de devenir une sorte de Bonnie & Clyde, jamais sérieux mais sévèrement émouvant.