J'ai mis quelques années avant d'avoir le courage de mettre le blu-ray dans la platine. Le réalisateur me plaisait, le tournage étalé sur plusieurs années, aussi. Mais ce qui me bloquait, c'est que je suis Briviste (lieu de tournage du documentaire), et avait vécu une période collégienne difficile à partir du jour où j'avais déclarer, en 5e, avoir envie de travailler dans le cinéma (technicien ou réalisateur, je ne savais pas trop) , et l'envie de replonger dans cette période avec un parcours presque identique, était faible. On rajoute 2 ados à la maison, ça ne fait pas beaucoup pour me motiver. J'avais l'impression inconsciente de revivre 30 ans plus tard, des choses déplaisantes. Et ce n'était pas le cas. Car le réalisateur à élargi son point de vue à une vision générale et non locale, comme je croyais bêtement. Le fond a peu d'importance car cela aurait été trop restrictif.
C'est un beau portrait de jeunes ados vers le démarrage post-ado. Si le sujet sur 2h15 passe en peu de temps, il faut reconnaître également que techniquement (montage, cadrage, prise de son), c'est un modèle. Tout est amené avec pudeur, même quand le sujet est plus cru.
Par contre il vrai, que connaître la ville amène quand même une vision légèrement différente du film. Cette amitié paraît socialement improbable, au départ. Mais son existence montre une innocence, même si elle va se dissoudre au fur et à mesure des années. Il n'y a pas de métaphore (ou presque), mais Emma habite dans une partie de Brive en hauteur, où sont établis les habitants avec un très bon salaire, les "bourges" quoi. Anaïs habite au bas de ces quartiers, beaucoup plus anciens et populaires, comme moi ado. Ces amitiés là n’existait pas à Brive dans les années 80, pas de mixité sociale (pour des raisons d'orientation, et de manière inconsciente j’espère, ça se retrouvait même dans le numéro des classes) . Si on pouvait parfois s'entendre, cela restait lointain. Ici, non, et j'ai trouvé cela très positif dans l'évolution des mentalités. ou presque...Car il y a le passage sur la présidence et Marine Le Pen. Les scores du Front National avaient été ridicule dans les années 80 et 90, toujours dans les derniers (même si j'ai failli me faire casser la tête parce que j'avais un badge "touche pas mon pote", mais une grille en fer, pourtant plus que visible, a cassé l'autre tête maladroite). Mais cela montre son acceptation, petit à petit, comme une pensée normale et encourageante... le portrait des parents est touchant, également. Pas dans le même sens, mais on peut ressentir beaucoup choses vécues, ou compréhensible, dans leurs discussions. Avec une envie de s'envoler pour Emma et Anaïs, et un ressenti maternelle identique, mais exprimé différemment. J'avais un parti pris au départ, mais il s'est envolé positivement dés les premières minutes, grâce au montage (au vue des scènes coupées, avec plus de présence dans la ville comme cadre).