Quel film !
After Hours est souvent décrit comme un Ovni dans la carrière de Martin Scorsese, et est donc, à mon sens, sous-considéré. Le cinéaste s'essaie ici à une forme de comédie. Avec beaucoup de réussite, je me suis franchement marré devant certaines scènes. Mais résumer ce film à ça ne lui rendrait pas justice. Il est bien plus que ça.
La réussite du film tient dans un premier temps à son écriture, toujours sur le fil : les situations absurdes s'enchaînent pour Paul, notre protagoniste. Si toute cette absurdité pourrait sortir le spectateur du film, la finesse des dialogues et l'interprétation des acteurs permet de rendre le tout assez crédible, voir même inquiétant. Et c'est cette ambiance assez sordide, aux frontières du glauque, qui m'a fait penser à du David Lynch. Certains malaises m'ont rappelé ceux que j'ai ressenti devant Mulholland Drive. Notre (anti) héros est piégé dans cette jungle urbaine de tous les possibles, au cours d'une nuit, très, très longue. Un vrai voyage en enfer, rempli de visions cauchemardesques, de mystères hallucinés et d'une paranoïa contagieuse.
After Hours est également un objet filmique fascinant à analyser. La réalisation de Scorsese est, comme d'habitude, excellente. Certains plans sont monstrueux d'ingéniosité !
Ce plan absolument génial où il tente de frauder le métro, et où la caméra nous montre au dernier moment l'agent de sécurité.
Les références à la sexualité, à la mort, et à l'emprisonnement par la société permettent une deuxième lecture du long métrage.
La puissance du film réside aussi dans l'imbrication des différents personnages (tous les rôles secondaires sont superbement exploités, en particulier celui de Rosana Arquette) et des intrigues. Différents comiques sont utilisés, ce qui rend le film riche et varié : souvent innatendus, jamais lourdingues, les gags fonctionnent très bien avec tout le reste.
C'est donc un film parfaitement maitrisé que nous offre ici l'ami Martin, qui lui permettra de faire le deuil du projet à l'époque avorté de La tentation du christ. Je dois avouer que je n'accroche pas tant que ça à l'univers "mafia gangster", je suis donc ravi quand Scorsese met son talent au service d'autres univers. Ce film est la preuve vivante que l'homme sait tout faire, avec brio.