After Yang du cinéaste Kogonada est une oeuvre hybride qui se sert de la science fiction pour s’interroger sur l’écueil du deuil et de la transmission. After Yang suit le chemin déjà tracé par Columbus : Kogonada est un esthète, précis et précieux dans son orchestration du cadre, et ayant un amour tout particulier pour l’architecture. Chaque plan se veut particulièrement soigné, élégant, chaque détail se veut subtil, nimbé d’une musique apaisante et ambiante. Il y a une atmosphère aussi douce qu’extrêmement mélancolique qui se dresse alors devant nous. On pourrait rapidement croire que cette esthétique puisse s’avérer vaine et indolore. Pourtant, derrière cette maestria un peu maniérée labellisée A24, qui pourrait venir d’une publicité sophistiquée pour de la décoration d’intérieure, se cache un véritable amour de l’architecture, de la mise à disposition d’une Nature sereine, des lieux et de la puissance mémorielle de l’environnement naturaliste ou technologique qui nous entoure. After Yang, c’est un peu comme si Blade Runner 2049 ou A.I. Intelligence artificielle avait été filmé par Sofia Coppola. 


A l’image de la trame narrative émise par son précédent film Columbus, où un fils essayait de faire le deuil de son père et dans le même temps de réapprendre à le connaitre par le biais de la construction, After Yang, dans un style plus ambitieux et science-fictionnel, dépeint une famille un peu dysfonctionnelle qui tente de réparer le robot familial. C’est un hommage à notre entourage, au passage du temps et aux traces que nous laissons aux autres : c’est l’une des pierres angulaires du film, notamment au travers de cette boite noire qui contient les souvenirs de Yang. Notre présence, qu’elle soit inscrite ou non dans la durée, se perpétue par nos créations et nos liens affectifs créés avec les autres. 


Cela parait un peu factice comme fil rouge narratif, un peu maladroit dans sa portée, mais le film s’imprègne parfaitement de son ambiance pour voir chaque personnage se questionner sur sa propre relation avec le défunt Yang, grâce à ces nombreuses synapses mémorielles qui seront visualisées par les uns ou les autres. Avec cette idée de souvenirs (effluves de The Fountain de Darren Aronofsky), de scruter les éléments du passé, faisant penser à l’épisode « Retour sur Image » de la première saison de Black Mirror, After Yang s’interroge sur la notion d’humanité, pour se demander si cette dernière n’est pas une limite en soi dans la catégorisation plurielle de chacun. 


Le récit, contemplatif et mutique, va partir dans de nombreuses directions pour permettre au spectateur de vouloir être guidé ou non : ce qui amène aussi par ce biais la notion d’intimité. Derrière ce portrait du deuil, idéalement retranscrit par la peine de la jeune soeur ou du mutisme évasif du père (Colin Farrell tout en retenue), Kogonada tente, et réussit, à créer une oeuvre ample qui tisserait sa toile sur de nombreuses thématiques : la transmission générationnelle (la relation frère/soeur), l’immortalité (l’envie d’être considéré comme être humain), la disparité émotionnelle entre les humains et les androïdes (ou clones), l’enracinement familial (le questionnement nationaliste et les origines), ou même la définition de famille (interraciale). 


Article original sur LeMagduciné


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le 5 août 2022

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Velvetman

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