Agents très spéciaux : codes U.N.C.L.E, tel était le seul film de ce mois de septembre que j’attendais de voir puisque ce mois est un peu, ce que j’aime appeler la période de désintérêt du cinéma chaque année puisque ce ne sont généralement pas les périodes ou l’on a le plus de film intéressant à voir venir, il faut en général attendre le dernier trimestre pour les gros titres et cette année ne fait pas exception.
Si vous suivez les sorties cinéma cette année, vous avez surement remarqué qu’actuellement le cinéma d’espionnage connait une belle période : cela a commencé avec Kingsman de Matthew Vaugh et Mission Impossible : Rogue Nation de Christopher McQuarrie le mois dernier. Prochainement on aura le droit à un nouveau James Bond signé Sam Mendes, et un nouveau film de Steven Spielberg plus prometteur que jamais, mais pour l’instant c’est à Guy Ritchie d’être sur le devant de la scène avec cette réadaptation d’une vieille série américaine (que je n’ai pas vu évidemment). Les bandes annonces annonçaient par ailleurs un film d’espionnage bien délirant en compagnie de Superman Snyder, et à défaut d’être dans la liste de mes réalisateurs favoris, Guy Ritchie est un metteur en scène britannique que j’apprécie bien.
Guy Ritchie est surtout connu pour ses films de gangsters à quiproquo hilarant tel que l’excellent Snatch ou le très bon Arnaques, Crimes et Botanique qui n’est que son tout premier film. Mais également pour ses deux très divertissant Sherlock Holmes qui sont les derniers films qu’il a sorti dernièrement il y a 4 ans maintenant. Mais pour en revenir à notre film, son succès est pour la moment assez discret puisqu’il a tout juste rentabilisé son budget de départ et que la critique, bien qu’appréciant globalement le film, n’est pas plus enthousiaste que ça sans compter une promotion pas spécialement poussive autour du film.
Ce qui ne m’a pas découragé d’aller le voir en salle, et dans l’ensemble j’ai eu ce que j’attendais d’après ce que nous promettait les bandes-annonces, même si ça aurait pu être bien meilleur quand on voit de quel série ça s’inspire et le contexte social que ça nous présente. Parlons d’abord du casting, et des personnages.
Oh Mon dieu : Superman est un espion ?
C’est le deuxième film dans lequel je vois Henry Cavill, le célèbre Superman de la version Zack Snyder qui a autant eu le droit à des fans qu’à des détracteurs, et toujours doublé dans la VF par l’excellent Adrien Antoine. Il interprète ici Napoléon Solo, un agent secret américain de la C.I.A travaillant en solo (Solo, seul, blague de merde, vous avez compris je pense), beau gosse, arrogant et charmeur contraint de faire équipe avec un autre espion pour démanteler une organisation criminelle mondiale. Si en soi le personnage n’apporte pas grand-chose de novateur, il arrive à être très crédible et sympathique grâce à l’acteur qui se révèle excellent, il apportera même pas mal de rire. Mais je trouve cela dommage de ne pas revenir davantage sur ses origines et sur son background, surtout quand on voit que les expositions ne sont pas ce qu’il y a de mieux fait dans ce film, j’y reviendrais un peu plus bas.
De l’autre côté, on a Armie Hammer, agent du KGB à la force herculéenne s’emportant facilement qui sera le partenaire attitré de Napoléon pendant la mission qui leur est confié. Je ne gardais pas un bon souvenir de l’acteur dans Lone Ranger : la naissance d’un héros, le problème venant surtout de son personnage et non pas du comédien. Mais ici, preuve est qu’il sait se montrer bien plus convaincant quand on lui donne un protagoniste réussi. Comme Napoléon, il n’apporte rien de neuf mais on l’apprécie rapidement et son binôme avec Napoléon, bien que classique, fonctionne suffisamment bien pour qu’on ne s’emmerde pas. Et là encore, des origines intéressantes mais pas assez mis en avant ou approfondi alors qu’il y avait matière à développer cela.
Faisons finalement un trio avec, personnellement, la grosse bonne surprise du film avec la sublime Alicia Vilkander en tant que Gaby Teller, qui se révèle également très convaincante et investie (en plus d’être sexy, si si je vous jure), même si son personnage n’a pas, non plus, grand-chose d’original à proposer finalement bien qu’elle apporte des bons moments. En clair un binôme sympathique complété par une demoiselle généralement agréable à suivre.
Pour le reste des acteurs, il y a bien Hugh Grant et Jared Harris mais ils n’ont que des petits rôles secondaires au final sans pour autant mal jouer, rien d’horrible à dire en ce qui me concerne en tout cas. En revanche, devinez quoi : l’antagoniste est totalement oubliable et terriblement creux pour un film d’espionnage. Elizabeth Debicki n’y met pas de mauvaise volonté et ne joue pas mal mais on a tellement peu d’élément sur elle et ses motivations sont si cliché et simpliste (comme dans pas mal de film d’action ces dernières années hélas) qu’on l’associerait sans mal à n’importe quel autre méchant de film d’espionnage à la James Bond, dommage pour une fois que c’était une femme le cerveau démoniaque de l’histoire. Luca Calvini joue un sbire de méchant comme n’importe quel sbire de méchant, rien d’horrible encore une fois mais oubliable, Sylvester Groth est correcte mais pas transcendant non plus et on notera la présence de David Beckham pour un court caméo parce que… parce que Guy Ritchie et lui sont britannique et que le réalisateur aime le football je suppose ? En gros, des comédiens qui remplissent très bien leur part du contrat, notamment ce cher Henry Cavill que j’ai hâte de revoir en Superman l’année prochaine, mais des personnages tantôt sympathique, tantôt oubliable tant on sent que Ritchie voulait rester dans la peau de la série des années 60’s.
Vive les 60's !
A la musique, Guy Ritchie a eu le droit à deux collaborations avec Hans Zimmer pour ses Sherlock Holmes, ici c’est Daniel Pemberton qui prend le relais et qui avait déjà fait un travail franchement pas mal pour Cartel de Ridley Scott. A la bonheur, c’est foutrement très entraînant, énergique, et on sent une inspiration très sympathique sur les airs de flûtes de Snatch mais aussi sur Ennio Morricone et le thème de Il était une fois dans l’Ouest
lors des passages ou Ilya est sur le point d’entrer en rage sauf que ce n’était pas du tout subtil lors de ces scènes-ci tant l’instrumentation était semblable, on pourrait presque crier au plagiat pour ce morceau.
Mais pour le reste, ça s’encre très bien avec l’univers 60’s du film et léger que vend Guy Rutchie, en plus d’avoir des choix musicaux de qualité en général dans le ton de la période de la guerre froide.
Autrement, je ne vais pas me plaindre de la mise en scène qui est ici propre à Ritchie et très dynamique, musclé, et qui se reconnait avec la coupure d’une scène en case de bande-dessinée donnant du relief lors de certaines scènes d’infiltration (procédé qui faisait moins BD dans Snatch mais ça n’est pas gênant pour autant), des scènes d’actions lisibles mais avec une caméra suffisamment vive pour immerger le spectateur avec une course-poursuite en début de film déjà présente dans la bande-annonce est se révèle plutôt cool, un mouvement de caméra à 90 degré sur le côté lorsqu’un personnage entre dans une scène, et aussi quelques astuces bien marrante pour exploiter l’humour omniprésent
comme celle ou Ilya et Napoléon débattent du sort de leur prisonnier alors que ce même docteur nazi se fait électrocuter sur une chaise électrique défectueuse, filmant le duo en pleine discussion avec le pauvre bougre en plan fixe, j’étais plutôt fendard à ce moment là je vous avoue.
En plus de cela, j’aime bien l’ambiance clairement 60’s que retranscrit le film avec son ton décomplexé et léger, coloré visuellement mais à la situation diplomatique particulièrement chaotique sans que ça ne soit traité de manière dramatique, bien aidé par une jolie photographie.
Du déjà-vu à la James Bond mais aussi des bons moments !
Mais c’est avec le scénario que ce film pêche particulièrement et montre clairement un problème qui est de réadapter une série aux vieux codes des années 60’s : faire une adaptation et une mise à jour d’une vieille série d’espionnage avec sa propre patte et son humour ? Je suis pour sans problème. Mais en faire un scénario trop convenu et qui n’est pas une histoire écrite trop simple et au final faible, je suis contre.
Et le premier problème de ce film s’implique au premier quart d’heure (en excluant la scène de course-poursuite) dans lequel les expositions concernant nos deux héros, leurs antécédents ainsi que leur mission sont très voire beaucoup trop rapide, on voit clairement que Guy Ritchie est pressé d’entamer son histoire et le vif du sujet, chose que je ne lui reproche pas, mais la gestion du rythme n’est clairement pas des meilleurs, ça montre ce que ça veut montrer mais ça ne prend pas son temps.
Aussi, pour l’ensemble des éléments mit en place, c’est du classicisme d’espionnage comme on en a souvent bouffé pendant des années, ça proposait un concept de départ qui aurait pu être jouissif et par moment la patte Ritchie marche grâce aux rires qu’apportent généralement notre trio de tête, en fait ça aide même à tolérer la simplicité du scénario. Même si certains de leur gag sont parfois un peu forcés
comme Gaby dansant sur une musique de l’époque et tentant d’entraîner Ilya avec elle jusqu’à entrer en mode rugbywoman physique avec lui (j’adore ce passage personnellement), mais pour voir Superman prendre un dîner mondain et chic dans un camion pendant que Ilya tente de semer ses ennemis en bateau pendant leur exfiltration, avant de littéralement écraser les poursuivants en bateau en leur roulant dessus brutalement, y’a de quoi se faire plaisir.
Notamment grâce à des dialogues souvent savoureux avec notre ami Napoléon Solo et ses face à face avec Ilya Kouriakine, tant par l’arrogance de l’américain que par la sobriété du russe. Mais si en général ça m’a fait passer un bon moment, il faut quand même admettre qu’en termes de rythme et d’histoire Guy Ritchie ne tente pas d’apporter quelque chose de nouveau, ça en devient même grossièrement prévisible
lorsque Gabi trahit Ilya et Napoléon afin de retrouver son père et que l’on apprend qu’elle est également espionne, même dans l’intention de faire une scène à la James Bond comme la scène de torture de Napoléon,
c'est au final assez prévisible malgré l’humour léger de Ritchie.
On voit même qu’on tente de mettre une énième scène de tension et de suspens
lors des dernières minutes entre Napoléon et Ilya, chacun étant censé récupérer un disque contenant des informations primordiale sur la course au nucléaire entre les USA et la Russie, mais franchement est-ce que vous avez vraiment pensé qu’ils allaient s’entretuer ? Entre le ton léger et la fameuse montre appartenant au père d’Ilya que Napoléon rend à son coéquipier et qui a été mis en exposition dans la première moitié de film, la scène ne sert finalement à rien donc pourquoi se casser la tête à tenter quelque chose qui de toute évidence ne marchera pas ? Parce qu’au final, ça n’apporte rien de plus, et rien de moins également.
Au final : honnête mais très classique !
Peut être que dans une éventuelle suite (ce dont je doute vu ses futurs projets) le metteur en scène aura l’occasion de creuser un peu plus ses personnages et de livrer un scénario moins classique et plus propre à son style, mais pour ce que c’est, le quota est rempli. Agents très spéciaux : Codes U.N.C.L.E est un chouette film d’espionnage sans prétention, drôle, rythmé et léger bien que très classique et parfois prévisible, une excellente musique malgré une inspiration sans finesse, très bien joué sans pour autant avoir des personnages novateurs. C’est clairement pas le meilleur divertissement que nous a proposé Guy Ritchie, avec Snatch ou Sherlock Holmes 2 a il fait bien mieux mais en tant que tel, c’est honnête et de bonne facture et comparé à d'autres divertissement sorti dans l'année, c'est largement plus potable que cette daube de Pixels ou Jupiter Ascending des Wachowski. Donc si vous avez un moment de libre, c’est un bon moyen de se détendre sans prise de tête.