Akira
7.9
Akira

Long-métrage d'animation de Katsuhiro Ôtomo (1988)

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La ressortie 4K d’Akira dans nos salles de cinéma est l’un des évènements phares de cet été 2020. Une claque d’autant plus vertigineuse qu’elle reste toujours autant d’actualité.


Akira, c’est une ville. Neo-Tokyo. Une architecture urbaine chaotique. De hauts buildings qui brillent de mille feux et qui se perdent dans les nuages. Cette verticalité vertigineuse se distingue du ciel pour se fondre avec fracas sur un bitume post-apocalyptique où le crissement des motos percute les explosions d’un amas de puissance. Dans cette nuit cyberpunk, où cet univers de fourmilière se tait après le passage d’une énergie pure, un éveil se fatigue face à la destruction. Le destin veut qu’une olympiade attende son heure pour faire taire les abîmes de l’infâme. Une torpeur prend garde, et une révolution prend date avec son histoire face une armée qui cache, derrière sa droiture et sa soif d’avancée scientifique, une divinité qui les éblouira tous, un mythe qui nous dévorera tous.


Dans sa quête de contrôle, dans le but de retrouver un semblant de vie, Neo-Tokyo est le lieu de la plaidoirie d’une humanité qui se meurt face à sa grandiloquence technologique, et la mise à nue d’une souffrance en sourdine où les mouvements idéologiques représentent une crise violente face à un tournant de l’évolution de la société. En retranscrivant son manga sur grand écran, Ôtomo crée une inertie visuelle sidérante, qui dévoile un pouls sonore extraordinaire, un rythme trépidant qui lie avec virtuosité la rage du trait et l’intimité du montage. Par le biais d’une imagerie adulte, d’où la violence résonne comme une bombe, c’est alors un monde qui accroît son ombre ténébreuse par la fusion de la chair et du fer.


Akira, c’est une jeunesse qui prend le nom de Tetsuo et Kaneda. Une amitié déstructurée par le destin, par la fatalité d’analyses scientifiques qui virent à la création de monstres aux pouvoirs sidérants, et avec des allures enfantines aux teints blafards. Mais porter la cape, qui verrait la naissance d’un super héros, ne signifie pas la résistance à la mort. C’est aussi le petit récit d’un amour sincère frappé de plein fouet par le pouvoir de la grandeur. Katsuhiro Ôtomo façonne le visage de cette adolescence, celle qui arpente les rues dans la douleur et l’amertume des laissés pour compte sans le moindre recours, animée d’une hargne maladive.


De cette jeunesse découle l’avenir d’une ville, d’un pays, qui fait le deuil de l’apocalypse, mais qui n’arrive plus à s’identifier à son image, à son reflet dans la brume. Alors la drogue et la baston deviennent le quotidien, la routine d’une journée pour des gangs de motards qui se pourchassent comme si ces autoroutes sinueuses étaient leur terrain de jeux. Elle exulte sa violence dans une réalité sanglante ou des rêveries hallucinatoires à l’imagerie aux références enfantines. Cela devient un mode de vie, qui inaugure une frontière invisible entre le bien et le mal, l’évolution et la disparition. Akira devient un cri du cœur, un crachat qui prend aux tripes, une envie d’exister pour ne plus subir les brimades, une émotion universelle, une volonté de briser les barrières de sa propre condition.


Akira, c’est un traumatisme où Ôtomo décrit les failles d’un système, le pouvoir d’un esprit qui s’empare de chacun de nous, la déchirure d’un pays par la métaphore d’Hiroshima, d’une nation qui veut se forger une puissance funeste : une protection pour détruire, ou une destruction pour protéger. À la fois philosophique et presque sociologique, l’essence du récit se révèle d’une modernité qui dépasse le cadre d’une simple époque. Pour se relever de sa douleur, la course à l’armement ne suffira pas, car à se croire Dieu, à vouloir imaginer ou consumer des croyances de l’au-delà, l’Homme part en guerre contre sa propre nature de créature, qui se leurre dans son costume du créateur.


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Velvetman
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le 11 févr. 2016

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