Nouvel égarement dans les limbes de KG, à la découverte de pépites pas toujours étincelantes issues de contrées reculées... En l'occurrence, une émanation du cinéma cubain non-officiel, et en son temps censurée. On pourrait penser que cette seule caractéristique contient en soi suffisamment d'intérêt pour légitimer un visionnage, afin de préciser les contours d'une période, d'un moment historique, d'un microcosme culturel, mais finalement pas tant que ça. Cette satire sur le quotidien à Cuba à la fin du XXe siècle se conçoit comme une variation sur le thème d'Alice au pays des merveilles — en reprenant principalement l'atmosphère fantastique et surréaliste du conte de Lewis Carroll, et non pas le contenu des aventures à proprement parler. C'est un film relativement peu compréhensible (pour une personne non-cubaine du moins) dans ses détails, ses références culturelles, ses enjeux, et dont les allusions à l'univers du matériau original constituent de bien maigres passerelles. J'avoue ne pas avoir très bien cerné les bizarreries autour des œufs frits et de l'eau sulfureuse... J'imagine que derrière les saillies absurdes et horrifiques se cache une critique très prosaïque de la société cubaine et de ses problèmes, l'objet probable des controverses. Un film qui se rapproche de son contemporain "Fresa y chocolate" (Tomás Gutiérrez Alea et Juan Carlos Tabio, 1993), tant dans les intentions critiques que dans la mise en scène un peu âpre et rude. Mais le film de Daniel Díaz Torres semble malgré tout beaucoup plus vindicatif et frontal dans la charge dirigée contre Castro, ce qui ne l'empêche pas d'avoir recours à une pléthore de métaphores et autres symboles disséminés un peu partout — la plupart étant peu accessibles, le reste sans doute invisible à des yeux non-avertis. Pas sûr qu'il restera grand-chose de la trame de fond, l'errance foutraque d'une jeune femme dans un univers barjot peuplé de personnages déglingués, dans ces conditions.