Asperge le mytho
Le dédale nous égare : Ridley Scott, en retournant à ses premiers amours, ne nous en facilite pas nécessairement l’accès : retour du monstre, suite de son prequel, quête des origines, récit fondateur...
le 12 mai 2017
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Cher Ridley,
Il fut un temps où j'avais beaucoup de respect pour toi, notamment après avoir pleuré des larmes de sang en regardant Blade Runner, qui reste et restera un des meilleurs films de SF de tous les temps. Après un Robin des Bois bien insipide, je me suis dit que ta carrière était sérieusement en train de décliner. Et quand on est sur le déclin, c'est bien connu, la meilleure solution c'est toujours d'aller piocher dans ce qui a fonctionné. Arrive ainsi Prometheus, et même si la bande-annonce m'avait bien fait bander, je savais au fond de moi que c'était casse-gueule mais potentiellement intéressant malgré le cachetonnage évident. La réputation du film parle pour elle-même : les fans de la première heure t'ont craché à la gueule, et beaucoup ne veulent même plus en entendre parler. Quant à moi, je le trouve effectivement très bancal scénaristiquement mais le design du futur et la mise en scène, ainsi que le grand Fassbender sauvaient les meubles, malgré l'utilité très (TRÈS) relative du film. Et même si Seul sur Mars était de bonne qualité, la prise de risques s’avérait inexistante et n'importe quel autre réal aurait pu faire le taf.
Autant te dire que j'avais beaucoup d'appréhension, ce qui ne fut guère arrangé par la bande-annonce qui annonçait clairement la couleur : une bouillie numérique. En plus, rien que le titre fout déjà le bordel, puisque techniquement c'est une suite de Prometheus. Mais bref, ce n'est que le premier signe annonciateur du viol à venir. Passé une introduction ma foi de bonne facture, on rentre dans le vif du sujet : on nous présente l'équipage qu'on va suivre, ou plutôt les mecs unidimensionnels qui vont de toute façon tous crever. Tous, sauf l'ersatz de Ripley qui, on le comprend vite, sera la vraie protagoniste du film. On nous impose donc ce clone raté de Carey Mulligan qui n'a pas une once du charisme de Sigourney Weaver, et qui sera la seule à avoir un semblant de développement. Et c'est là qu'on se rend compte qu'en fait, Alien Covenant, c'est Prometheus, mais encore pire, genre 10 fois pire. On nous sert, en lieu et place d'un vrai scénar, un remake du premier Alien mélangé à une suite de Prometheus. Quel immonde imbécile a pu penser un seul instant que ça allait marcher ?
Dès les premières minutes, Ridley, j'ai su que ça sentait mauvais. Si l'on excepte Fassbender qui, comme à son habitude, casse des culs à chaque scène, le casting est bien foireux. Crudup, qui est censé porter une bonne partie du film, joue juste seulement une scène sur deux, et encore. Danny McBride, hors de son registre habituel, est le seul à s'en sortir à peu près correctement, mais l'écriture des personnages est si catastrophique qu'on a seulement droit à des personnages fonctions. Ensuite, au niveau de la mise en scène, à part deux-trois plans bien chiadés c'est super fade, à des années lumières de Blade Runner. Et quand ça devient un peu intense, c'est shaky cam en veux-tu en voilà, et si l'on ajoute le montage absolument illisible on a notre combo gagnant du réal qui devrait prendre sa retraite rapidement. Sérieusement, pendant le combat des deux Fassbender, j'ai failli sortir de la salle tellement c'était du foutage de gueule. Tu vas me rétorquer que c'est fait exprès, que c'est pour amener ton vieux twist tout périmé visible à des kilomètres et qui m'a fait bouillir intérieurement pendant la dernière partie du film. Je te répondrai que si, selon l'adage, c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures confitures, il faut d'abord enlever tout le moisi qu'il y a au fond.
Mais surtout Ridley, et c'est la raison principale pour laquelle je fais cette critique, et fais bien attention car c'est très important : la saga Alien ne t'appartient pas, elle ne t'a jamais appartenu. C'est tremblant de rage que j'écris ces lignes, car en violant cette saga tu viens de pisser sur la tombe de Dan O'Bannon et H. R. Giger, les vrais créateurs de cette saga, avec Ronald Shusett. Je suis bien content qu'ils ne puissent pas voir cette atrocité que tu as commise en leur nom. Mais apparemment ça ne te dérange pas plus que ça de te faire de la thune sur des mecs morts, et c'est ça qui est détestable. Tu as semble t-il déjà prévu une suite, et bien ce sera sans moi. Même Life était un meilleur hommage à Alien putain, tu te rends compte ? Je ne pensais pas un jour réutiliser sérieusement une phrase de Durendal, mais c'est pourtant le cas : va bien te faire foutre Ridley, et arrête le cinéma, genre tout de suite.
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le 11 mai 2017
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