« This whole thing was a trap » Pas tant que ça

Paul W.S Anderson n’est pas aimé de tous, loin de là, mais les 2 adaptations de jeu vidéo qu’il vient de réaliser ont toutes deux été très rentables, c’est donc à une nouvelle franchise qu’il va pouvoir s’atteler, une qui est à la fois adaptation de jeu vidéo et croisement d’univers cinématographiques distincts : Alien VS Predator. Si les fans des œuvres cinématographiques étaient en droit d’espérer un plus grand nom que celui d’Anderson pour un projet si ambitieux et prometteur, au moins il peut s’amener avec les moyens, plus de 60 millions de budget, et nous ne sommes pas à l’abri d’une bonne surprise en misant sur sa collaboration avec des artistes emblématiques et majeurs des franchises, les scénaristes du premier Alien en tête.


SCENARIO / NARRATION : ★★★★★★☆☆☆☆


Le concept de base est assez simple, une compagnie privée découvre un temple et entreprend une expédition au plus vite pour avoir l’exclusivité de la découverte, réunissant des experts non préparés à une telle mission ou à travailler ensemble et qui vont se retrouver pris au beau milieu d’un combat entre Predators et Aliens, les premiers faisant apparaître délibérément les seconds dans l’objectif de les chasser alors qu’ils sont prêts à tout pour se répandre au-delà du temple. Si ce synopsis limite les possibilités de science-fiction, il entend respecter les principes fondamentaux des créatures et placer leur combat au centre de tout, ce qui semble bien répondre à la promesse du croisement des univers.


Alien VS Predator se débarrasse pourtant assez vite du soucis de continuité avec les précédents films, l’action prend place sur Terre à l’époque de sortie du film, en totale dissonance avec le fait qu’aucun humain n’a reporté la présence de xénomorphes comme le confirme Aliens, et plus précisément en Antarctique, lieu délibérément choisi par les Predators alors que les films avaient tant insisté sur leur goût prononcé pour la chaleur. C’est pareil pour le personnage de Charles Bishop Weyland incarné par Lance Henriksen qui rentre donc en opposition avec le personnage de Michael Bishop d’Alien 3, offrant 2 explications contradictoires au design de l’androïde d’Aliens.


Mais même en son sein, les règles de l’univers sont dissonantes les unes par rapport aux autres, il n’y a qu’à compter le temps d’incubation des bébés Aliens qui varient d’une victime à l’autre selon les besoins du scénario et les idées de mise en scène. L’idée de base était certes correcte mais son exécution est assez imparfaite, même si on peut toujours dire que ce n’est pas si grave vu que ça niche toujours dans des détails. Dans les grandes lignes, le récit se tient à peu près dans l’univers sans trop y faire tâche, c’est sans doute déjà beaucoup pour une exploitation commerciale entre les mains d’un cinéaste réputé pour ses purges.


Si le scénario met en scène plein de personnages peu intéressants intégrés au casting juste pour être des victimes, y compris ceux qui sont présentés comme très capables de se battre en théorie, l’intrigue finit par se recentrer sur quelques personnages principaux et notamment la protagoniste qui est plutôt convaincante en faisant preuve de sang-froid, d’intelligence, de courage… tout en ayant ses moments de doute, de tristesse… ce qui paraît très pertinent puisque ce concept est au cœurs des 2 franchises et on retrouve un peu l’idée d’Alien avec une actrice principale talentueuse mais méconnue en la personne de Sanaa Lathan, même si elle est annoncée très vite par le film dans ce rôle-là.


On a aussi droit à quelques idées narratives réussies comme la communication non verbale entre elle et le Predator, parfaitement clair et étonnamment audacieuse. Ça aurait pourtant pu tourner au drame très facilement. Ah et en parlant de ça, il faut aussi qu’on parle de l’idée finale du film :

Ce Prédalien est un peu tout et son contraire. Il est à la fois très mal amené, puisque le Predator aurait dû être conscient d’en être porteur, détecté par ses compères et leur vision infrarouge, non attaqué par la Reine Alien qui en est indirectement responsable… Il termine le film sur un teasing un peu grossier pour une suite qui n’est pas même pas bien établi. Et en même temps il ouvre tellement de perspectives, colle parfaitement au projet de mêler les univers, garantit une direction différente de ce film pour sa suite… il est un peu à l’image de ce film finalement.

RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★☆☆☆☆


Le film s’essaie bien à quelques jolis plans en matière de photographie avec le paysage de l’antarctique et sa pyramide maison avant de les réserver aux créatures elles-mêmes qui ont chacune le droit de célébrer leur victoire à leur manière, ce qui est plutôt surprenant et bienvenu de la part du réalisateur qui peut vite oublier cet aspect au profit de l’action nerveuse. Celle-ci est pour sa part assez inconstante, parfois assez illisible à cause d’une caméra trop rapprochée et remuante, parfois assez impressionnante avec des vraies idées de mise en scène en lien avec le décor pyramidal, le sang acide des Aliens...


Il faudra vraiment attendre la dernière partie du film pour que les meilleures idées apparaissent et qu’on retrouve à la fois des scènes hommages à Predator et à Alien séparément avant qu’elles soient assez bien mêlées. Ça vient un peu tard mais c’est franchement pas mal du tout, bien au-dessus de ce que le réalisateur peut proposer habituellement. Rien que pour ça, le film gagne un minimum ma sympathie, c’était tout de même ce que j’attendais et il aurait été facile de se planter en donnant trop d’importants à des fusillades classiques qui sont heureusement vite écartées malgré la démultiplication des fusils mitrailleurs.


Par contre, le design des Predators leur donne une apparence de gros balourds éloignés du design plus félin des productions originales. On peut supposer que tous les Predators sont différents et qu’une telle variation puisse parfaitement exister mais ça ne va pas tellement avec leur côté chasseur, je trouve ça un peu dommage tout de même. De la même manière, leur équipement n’évolue pas depuis Predator 2 en dehors de la carte holographique depuis le poignet, faisant plus référence gratuitement au jeu vidéo pour le coup, et le Shuriken remplaçant le disque, pas bien original même si un peu plus stylé.


A l’instar du précédent film soi-disant horrifique du réalisateur, quelques jump scares particulièrement ratés parsèment le film mais je pense que le problème central est ici différent : on sent bien une retenue dans la violence visuelle des affrontements, ce qui est tout de même inappropriée pour le croisement de 2 univers très différents mais qui avaient en commun dès leurs origines cinématographiques une violence visuelle parfois poussée à l’extrême. Et comme pour Resident Evil, aucune tentative de créer l’ambiance anxiogène réclamée par les fans, même sur quelques minutes, ce qui est nécessairement décevant.


Même en reprenant des scènes supposément glauques d’Alien, elles sont tellement éclairées et tellement peu insistantes sur la souffrance supposée des personnages qu’elles ne sont pas l’ombre de leur équivalent dans les premiers films de la franchise. Mais ça ne m’a pas tellement déçu car ça s’inscrit dans la continuité de la filmographie du réalisateur et le film n’a jamais prétendu renouer avec l’horreur originelle d’Alien. Il en est de même pour les thèmes musicaux qui accompagnent bien sans tenter de marquer particulièrement les esprits comme ont pu le faire ses plus illustres aînés.


CONCLUSION : ★★★★★★☆☆☆☆


Alien VS Predator trébuche à plusieurs reprises et ne parvient pas à la hauteur de sa promesse sans pour autant démériter avec suffisamment de bonnes idées et qualités scénaristiques, narratives, artistiques ou encore techniques pour garantir un divertissement pas si déconnant que ça sans trop desservir les franchises qu’il mêle. L’un des films les plus solides de la filmographie de Paul W.S Anderson, ou les moins bancals plutôt, réussit au moins ça et pour ma part je ne considère absolument pas que c’est le début de la purge pour la saga Alien & Predator dans son ensemble, plutôt une nouvelle déclinaison imparfaite dans la lignée des productions des années 90 des 2 franchises.

damon8671
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