Le Chef d'œuvre du navigateur solitaire.
Avec ce film, le réalisateur de "Margin Call" démontre que l'on peut faire un film si différent des autres tout en restant magique. Avec "All Is Lost", fini les drames aquatiques qui essaient de vous tirer la larme à l'œil quand le héro passe l'arme à gauche de justesse, fini les monologues peu efficace des " Survival " d'un gars en perdition. Là on entre dans un film vraiment bien construit et réfléchi, c'est le genre de film que j'aime à appeler "authentique" et non pas "réaliste", puisque le rôle qu'endosse excellemment bien Robert Redford qui sera toujours pour moi mon petit Steven, est magistralement intéressant, même si, de sa part, nous n'avons aucun information. Et c'est d'ailleurs l'un des charmes du personnage. Même si ce film se concentre sur la mésaventure de notre personnage "désolé", le film va bien au-delà que d'un simple film d'aventure dramatique que l'on voit le dimanche aprèm sur TF1.
C'est l'histoire d'un mec, il navigue à travers les océans, seul et loin de tout, dans son navire, le "Virginia Jean". Robert se glisse dans la peau d'un marin qui se réveille dans son radeau inondé, la coque percée par un container, il répare son bateau mais il est tellement en veine qu'il se tape une tempête. Robert l'amoureux des mers ne lâche pas prise. Mais la tempête persiste et il se mange le mat dans la gueule. C'est la goute qui fait déborder le vase, il quitte son radeau tout cassé pour un petit séjour en canot de sauvetage. A partir de là on entre dans un pur Survival où l'homme et la mer se livrent un combat pour survivre. Robert voit passer un bateau, puis deux, puis réalisant que les fusées ne les ont pas trop aidé comme un foc pour son navire en pleine tempête, il décide de mettre feu à son canot pour se noyer. Et là Dieu (ou l'homme ?) vient lui sortir la tête de l'eau.
Après ce résumé pitoyable et très condensé, je refuse d'entendre dire qu'il ne se passe rien dans ce film. Et je ne le comparerai surtout pas à " Captain Phillips " et encore moins à " Gravity ", je trouve All Is Lost bien trop différent, et si je voulais être méchant (et je le suis), je dirai que Redfort, sans même parler, arrive à nous dire cent fois plus de chose que Bullock. En même temps, nous connaissons Robert Redford et sa carrière bien remplie, et avec ce rôle il nous prouve encore qu'il est toujours très diversifié et impliqué dans ses rôles. J'aurai eu du mal à voir un autre acteur (en tout cas pas François Cluzet ça c'est sûr). Olivier de Kersauson disait aux acteurs que " la mer est un métier digne et non pas un métier de saltimbanque comme le vôtre ", Redford a su prouver que dans "All Is Lost", il n'était plus un acteur mais un navigateur. Et c'est ça qui rend ce film authentique. Alors certes, deux tempêtes dans la gueule en survivant, le bateau qui se retourne et compagnie, ça paraît gros en 8 jours pour la même personne, mais ce même Kersauson est bien parti des océans avec son mât brisé pour revenir, sauvant tout son équipage, alors merde, les bons marins existent, même vivant.
Le plus brillant dans ce film, c'est évidemment l'interprétation de Redford, il joue un gars usé, totalement détaché à ce qui lui arrive, il ne laisse paraître que très peu d'émotion, notamment avec son fameux "ffffffff … fffuu … FUUUCK" qui en un mot résume toute la détresse d'un homme dans sa situation. On ne connait absolument rien de lui, et ce qui est fort c'est qu'on a envie de le voir sauver à la fin, alors qu'il pourrait très bien être un salaud fini, on s'attache tout de même à lui. Et plus que de l'attache, on peut se sentir à sa place car après tout, qui n'a jamais eu envie d'être peinard sur un bateau à des kilomètres de toute autre être humain pour écouter la mer, seulement la mer. Bref, ce film est un périple à apprécier et sans doute à regarder seul. Ce qui n'est pas forcément le d'un film mais bon …
En dehors du personnage et de Redford, je salue le grand géni du réalisateur à ne pas nous avoir poussé à bout avec des monologues puisant dans l'incompréhension et la facilité à la " Gravity " (désolé, c'est plus fort que moi). Contrairement au précédent, ce n'est pas un film bateau, là l'homme est seul, il n'a pas besoin de développer une schizophrénie partielle pour les besoins du téléspectateur avide de connerie verbale en tout genre. Le navigateur n'avait qu'une chose à " dire ", il l'écrit, point. Bravo aussi pour ne pas nous avoir torturé les tympans avec des musiques de haute suspens à chaque fois que le gars boit la tasse, d'ailleurs en ce qui concerne la musique, elle est très bonne même si un peu redondante. Puis bravo d'avoir fait un film sans fin sans que ça ne se termine en eau de Boutin, là on ne sait pas s'il est sauvé, où s'il est mort, et quant bien même serait-il mort, on ne sait même pas quand, il aurait tellement eu l'occasion d'y passer. Je dis ça aussi pour le final, où comme par hasard il se réveille pour voir une faible lumière au loin, ça me semble trop maladroit pour ne pas cacher quelque chose. Ça aurait été peut-être plus logique de terminer le film sur l'homme qui jette son bocal à la mer … peut-être ? Bref, un film à voir malgré la distribution à chier des cinémas.
Bon Film :)