Ridley Scott est un réalisateur qui a touché à beaucoup de genre avec un certain bonheur (la science fiction avec Alien et Blade Runner, l'action avec Black Rain, le film de guerre avec La chute du Faucon noir, la comédie avec Les associés, le fantastique avec Legend, le road movie avec Thelma et Louise, etc...) mais il ne s'est pas encore frotté au film de mauvais garçon, de voyous.... de gangsters. C'est désormais chose faite avec cet American Gangster, un film qui parle de gangsters.... Heu... américain
Il choisi l'angle « histoire vraie » et la confrontation de deux poids lourds du cinéma US, à savoir Russel Crowe et Denzel Washington, pour ce nouveau film, symbole d'une certaine volonté de faire « artillerie lourde » hollywoodienne. La confrontation du noir (le méchant) et du blanc (le gentil) est le premier truc qui frappe dans le film : le méchant est très méchant (lors de sa première apparition on le voit en train d'abattre un type sans sourciller), et le gentil est vraiment très gentil (Non moi chuis pas un bâtard de corrompu). Un tel manichéisme fait très peur tant les traits sont grossis. Heureusement le personnage de Denzel Washington prend vite de la nuance et de l'épaisseur (sa relation à la famille notamment et son exigence vis-à-vis de lui-même) mais par contre celui de notre Russel-flic-Crowe s'enfonce dans les clichés les plus risibles : Pure et droit sans même réfléchir, il se bat pour sauver son fils façon Balavoine, il a un pote un peu louche mais il sait faire la part des choses, son équipe est au dessus de tout soupçon. C'est à tel point que la performance sobre du comédien aurait tendance a passer pour du je m'en foutisme tant on arrive pas à croire à ce personnage qui n'éprouve ni le vice ni même le doute. Denzel assure sa partition convenablement et même s'il nous ressort sans arrêt ses tics habituel (gestuelle ample des mains pour la mise en confiance et demi-sourire pour charmer), il faut reconnaître qu'il a un charisme inné et qu'il convient plutôt bien à ce personnage.
Donc pour un film qui se base surtout sur ses personnages c'est déjà un peu bancal mais le tout est accentué par un scénario un peu flemmard qui fait rejoindre les 2 trajectoires beaucoup trop tard. Lorsque c'est enfin le cas, c'est réglé en 4 minutes chrono et on zappe des détails de leur relation, détails qui sont simplement énoncé par un carton alors qu'on aurait aimé en savoir un peu plus. Le parcours de l'ami Russel devient ainsi de plus en plus anecdotique dans le déroulement de l'intrigue, on ne comprend pas vraiment comment il fait progresser son enquête et au bout d'un moment on s'en fout un peu. Ajoutons à cela un sous texte politique sur la corruption de l'état bien édulcoré car mis en retrait et relégué au simple rang de moteur narratif pour justifier les rebondissements de l'intrigue. Résultat : de confrontation, il n'y en a point. Le récit s'enlise tout seul à développer son intrigue autour de 2 personnages dont un des deux ne nous apporte rien. En résulte un film assez pénible à suivre par moment, qui passe son temps à frôler son sujet sans le traiter.
Il y a bien des choses pertinentes comme le fait d'utiliser les médias (radio, télévision, journaux) pour ponctuer la chronologie du film ou bien un gunfight à l'efficacité dont seul l'homme derrière La Chute du faucon noir à le secret mais il faut reconnaître que ça reste assez plat. Le plus dommage étant que le film ne parvient pas à restituer une ambiance 70's vraiment digne de ce nom.
Bref ce American Gangster peine vraiment a trouver sa voie. C'est un film tiède qui n'arrive pas à cacher ses lacunes, la faute à un script et à un réalisateur s'accrochant trop à la notion d' « histoire vraie » pensant que ça suffisait pour faire un grand film. Las, le film manque de souffle, d'énergie, de chair, bref on a vu le père Scott plus en forme.