Qu'on se le dise, American Sniper est un film de guerre... Parfaitement réussi et réaliste.
Ici le but n'est pas de dénoncer ou de justifier la guerre en Irak, il s'agit de présenter la guerre à travers le parcours de Chris Kyle, navy seal qui effectua pas moins de 4 tours d'un an dans un des conflits les plus violent de ces trente dernières années.
Aussi une fois ceci énoncé, les critiques accusant le film de patriotisme exacerbé n'ont aucun sens... Clint Eastwood en restant collé au personnage de Chris Kyle nous expose la vision de ce dernier qui est celle d'un patriote... L'homme s'est entraîné pour le combat et une fois que son pays l’envoie en guerre en lui désignant en face un ennemi de l'Amérique et du monde libre... le combattant n'a qu'un seul but, détruire l'adversaire pour vaincre et sauver un maximum de ses compatriotes. L'homme Chris Kyle est convaincu du bien fondé de sa cause, convaincu du fait qu'il se sacrifie pour son pays et les valeurs qu'il incarne, et convaincu que tous les ennemis qu'il a abattu au cours du conflit méritaient de mourir car ils étaient armés et cherchaient à tuer des Américains ou des Irakiens.
De la même façon l'ennemi n'est pas idéalisé ni d'ailleurs diabolisé... Les "insurgés"sont essentiellement Sunnites, parfois ce sont des combattants qui sont là par patriotisme, mais bon nombre ont des motivations d'ordre idéologiques et religieuses. Beaucoup sont des étrangers venu se ranger dans les rangs d'Al Qaïda en Irak et sont dans une logique de guerre sainte, à la fois contre les Américains qui incarnent l'ennemi ultime mais aussi contre les chrétiens d'Irak, les Chiites et de manière générale tous ceux qui sont liés au nouveau régime irakien en place.
Le décor est planté, et cette guerre présentée par Eastwood n'a rien de romantique, elle est âpre, brutale et sans merci, le seul objectif pour le combattant qui en est au cœur étant de détruire l'ennemi.
Pour en terminer avec le volet conflit qui est l'un des deux fils conducteurs de ce film, il est réaliste, bien mené, avec des scènes de combat saisissantes, des acteurs d'un très bon niveau et une ambiance oppressante et enivrante à la fois qui témoigne à elle seule de la qualité de ce film de guerre.
Le deuxième volet de ce film est celui de la vie civile... Avec notamment la vie de famille, les retour au pays entre deux déploiements puis enfin la difficile reconversion une fois les armes raccrochées.
Les sacrifices familiaux sont énormes et la douleur ressentie par les familles de tous ce soldats américains déployées dans un conflit lointain et violent est bien retranscrite ici à travers le cas de Chris Kyle. Ces hommes partaient 1 an loin de leurs familles et risquaient leur vie pour leur pays -ou pour rien- selon telle ou telle partie de l'opinion publique. Dans tous les cas les sacrifices étaient énormes et donc voir les époux/pères/fils revenir était un vrai soulagement en même temps qu'un moment particulier et parfois difficile car des combattants qui ont vécu pendant un an dans l'enfer irakien peinent à revenir à un quotidien (faire les courses, tondre la pelouse, s’occuper des enfants...) qui leur paraît parfois futile. En effet leur réalité guerrière les a propulsée dans un monde de souffrance et de sacrifice difficilement compréhensible pour un civil et du coup accompagné d'un manque de reconnaissance qui est une source de ressentiment important pour le soldat... En tout cas Chris Kyle à l'instar de beaucoup d'autres le ressent comme ça. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il s'attachera à s’occuper des vétérans après sa carrière militaire, car il ne veut pas que leur sacrifice soit oublié et parce qu'au sein de cette "famille" de l'armée US il faut "veiller les uns sur les autres".
Pourtant les images -dont certains se demandent pourquoi elles ont été rajoutées au film-- du cortège funéraire du Seal tué par un de ces mêmes vétérans montre qu'aux Etats-Unis le sacrifice des soldats est quelque chose qui n'est pas pris à la légère. Il y avait sans doute au bord de cette route beaucoup de gens qui ont eu un proche engagé dans ce conflit et qui sont peut-être rentré chez eux grâce à des hommes comme Chris Kyle, lequel a sauvé la vie de tant de Marines. Il y avait sans doute aussi des gens qui louent le sacrifice de l'homme pour son pays au-delà de toute considération politique qui peut justifier l'envoi des soldats en terre étrangère. Pour les proches des soldats tués, le seul réconfort réside souvent dans le fait de se dire que ceux-ci ne sont pas mort pour rien, les cortèges que l'on voit aux Etats-Unis, en Angleterre ou au Canada lorsque les cercueils des soldats tombés sont rapatriés sont pour les enfants, les parents et les proches des tués de manière générale le plus grand des réconforts. A l'inverse se retrouver avec une centaine de personne sur le pont Alexandre 3 à Paris pour voir un des siens revenir dans un cercueil dans une indifférence générale doit être terrible... Clint Eastwood ne glorifie pas la guerre, il respecte les soldats qui la font au prix d'énormes sacrifices, ils respectent aussi les familles de ces soldats pour lesquelles les sacrifices sont au moins aussi grands...
Ce que American Sniper incarne et résume au final, c'est que lorsque l'on est engagé dans le combat, les considérations politiques importent peu, seule compte la possibilité de pouvoir rentrer chez soi avec ses frères d'arme.