« Amour » de Michael Haneke, inclus de manière plutôt discrète à la sélection du dernier festival de Cannes, à réussi à surprendre tout le monde avant de décrocher logiquement la palme d’or, 2ème pour ce réalisateur très polyvalent réalisant des films en à la fois en allemand, anglais et français. « Amour » est estampillé « Les films du Losange », société de production ayant publié la quasi-totalité des films d’Eric Rohmer, et qui réussi si bien à Haneke depuis son film « Caché » en 2007. En effet, à l’image des comédies sociales de Rohmer, on sent le désir d’Haneke de se conformer à ce style très sobre, ultra-réaliste et élégant qui est la marque de fabrique du maître de la nouvelle vague, il en résulte ce film « Amour » sur le thème de vieillesse et des difficultés qui en résulte, décrites sans concession et parfois de manière insoutenable.
La première séquence du film montre l’intervention des pompiers dans un appartement parisien, afin d’y découvrir le corps inanimé de la protagoniste, Anne. Ainsi on est confronté dès le début à la dure réalité de la vie, il n’y a pas de fin heureuse avec la mort en option, la mort étant au contraire la seule option possible, pas de spoiler ici puisqu’on apprend dès le début comment tout se terminera. On découvre alors la vie et l’intimité d’Anne et Georges, couple octogénaires cultivé et vivant aisément dans leur spacieux appartement parisien. Anne et Georges assistent à un récital de piano dans lequel brille un ancien élève d’Anne, on comprend alors qu’elle était professeur de Piano et que par conséquent la musique classique tient une place importante dans leur vie. On découvre également leur vie commune, leur habitudes et entente mutuelle, leurs enfants, tout cela patiemment au travers des dialogues et échanges longs mais jamais rébarbatifs. Une présentation d’une routine parfaite et harmonieuse qui sera perturbée par les attaques cérébrales d’Anne, entrainant la dégradation progressive de son état de santé.
J’ai été fortement impressionné par la symbiose entre les personnages d’Anne et de Georges, respectivement interprétés par Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant, il s’agit de deux géants du cinéma français, et bien qu’ayant pu les regarder dans plusieurs films, j’ai eu néanmoins du mal à les reconnaitre ici, ou plus justement j’ai pu les découvrir sous un jour nouveau. On s’attache progressivement à leur entente, la paix intérieure qu’ils ont trouvé dans leur vie commune, le titre du film « Amour » prend ainsi tout son sens à mes yeux. Cet Amour s’est consolidé, et se confirme également dans l’adversité qui a jusqu’ici épargné ce couple, Georges continuera d’assister et protéger sa femme dans la maladie sans se poser de questions, malgré la difficulté qu’il y trouve à cause de son âge avancé, ce même amour provoque également une certaine culpabilité chez Anne, ne désirant pas imposer sa condition à son être aimé.
Le film traite accessoirement de l’euthanasie, mais ne le fais jamais de manière explicite. Haneke qui ne nous avait jamais habitué à autant de sérieux évite également de donner des leçons de morale à son public, le laissant seul juge des actions et des motifs qui se cachent derrière le comportement des deux protagonistes. Il s’agit d’un exercice très difficile qu’on ne retrouve pas souvent dans les films traitant de sujets aussi sérieux. Malgré l’insouciance et la santé de la jeunesse, ce film à été pour moi une expérience très intense, et j’imagine que cette même expérience sera d’autant plus intense lorsque je regarderais ce film une nouvelle fois à un âge plus avancé.