Michael Haneke vous êtes un salaud. Oui. Un pur. Un beau. Cependant vous êtes également l'un des plus grands maîtres de cinéma d'aujourd'hui. Un grand merci. Si à chacune de vos autres réalisations nous ressentions du dégoût envers tout ce que vous mettiez en scène, répugnance ici, il n'y a pas. Vous avez toujours composé vos symphonies par le biais de sujets terrifiants, votre Amour ne fait pas office d'exception. Bon nombre de critiques furent surprises, déclarant que vous aviez laissé un place reine au sentimentalisme, elles se laissèrent alors aller à verser une larme. Non. Car si les connaisseurs de votre filmographie ont perçu un quelconque relâchement dans votre dureté coutumière, il s'agit bien moins d'une violente chute dans le pathos qu'une peinture amoureuse glaciale et effrayante. Votre mise en scène est (comme toujours) qualifiée de digne, sèche, distante mais ne pourrait s'empêcher de recevoir le titre de brillante. Chacun de vos silences raisonnait aux oreilles comme une détonation impétueuse provenant du ciel lui même. Les heures se figèrent, le temps d'une mort, imposant le respect. Il serait impossible de ne pas parler de vos deux interprètes, devant lesquels je m'incline au plus profond de mon être. Trintignant à qui la distinction, la voix, la sagesse et le talent ont pleinement contribué à la grandeur du personnage. Riva affaiblie, meurtrie, mourante mais plus belle que jamais. Tous ces cruels éléments instaurent une distance entre le spectateur et ce qui se déroule à l'écran. Ce dernier est indécis. Il ne sais pas, ne sais plus, est perdu. Les rares moments où l'émotion survient, sont étranges, insolites et provoquent un état de béatitude ou d'indignation. Un regard dans le vague, une apparition détestable, une parole injustifiée, un gémissement, un cauchemar déserté... La peur, la haine, la souffrance, la pitié, l'admiration mais loin des pleurs. Vous nous offrez ce que vous avez toujours eu coutume de faire : La vérité. Elle est et sera toujours aussi belle que terrible à entendre. Même atroce, mais votre brio, votre recul et votre finesse nous donnent une magnifique leçon. Nous nous retrouvons face au monde, face aux autres, face à nous même. C'est sur les plumes rances et les fantômes trop vivants que se joue la puissante mélodie du vide. Une claque honteuse sur un océan de parchemin vieillissant. Les larmes sèches et absentes d'un autre temps. Un chemin lent et douloureux vers la mort, une torture de tous les instants. Au centre de ces gris évènements, l'amour. Un amour malgré les âges. Un amour lié par une promesse. Un amour qui n'a plus de raison d'être. Un amour, une haine.
Rat
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le 23 mars 2013

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