J'ai cru que ça allait être un petit bijou. Non pas en achetant le film : je l'avais pris parce qu'il ne coûtait que 2€ et parce que le casting m'intriguait ; pas non plus en lançant le disque dans le lecteur DVD : j'ai pris un film au hasard dans ma bibliothèque, j'ai regardé la durée, ça m'a suffit (ce n'est qu'après avoir refermé le lecteur que j'ai lu le synopsis). Non, c'est pendant les 20 premières minutes que je me suis senti bien devant ce film.
Le personnage est sympathique. Pas original, mais ce genre d'autiste de la vie est toujours trucculent à suivre. Les situations sont bien trouvées : comment bouleverser la vie d'un type qui a toujours vécu reclus. Ce n'est pas finement orchestré, on ne comprend pas, par exemple, comment il a pu ignorer la télévision pendant si longtemps car on ne nous montre jamais la vie de reclus qu'il a pu avoir. Et lorsqu'on apprend qu'il était marié, on en vient même à se demander comment ce couple vivant dans un lieu pas si reculé que ça a pu vivre de la sorte ou tout du moins comment le monsieur (puisqu'il ne nous est jamais donné l'occasion de rencontrer madame) a pu passer à côté de tout cela. Mais ça fonctionne quand même, l'humour aidant à oublier ces problèmes narratifs.
Très vite, un objectif principal est annoncé. Enfin, en lisant ;e synopsis, je pensais que ça irait plus vite que ça, que ça ferait partie de l'élément déclencheur et que l'histoire débuterait avec la rencontre entre les deux hommes. Nenni ! Il s'agit de l'objectif principal de la première moitié du film. C'est toujours intéressant mais on sent déjà quelques faiblesses d'écriture passé les 20 premières minutes : le personnage a déjà révélé toutes ses failles, les situations se renouvellent de plus en plus difficilement.
Et arrivé à la moitié, l'attention du spectateur se relâche : l'objectif est atteint et les auteurs peinent à en trouver un autre. Il y a bien l'idée de bouquin annoncée dès le début, mais ça n'est jamais assez poussé pour vraiment devenir le centre d'intérêt, de nœuds, de tension. Quant à la romance qui s'installe, elle est évidente, le révélation finale paraît d'ailleurs absurde puisque tout le monde sauf le héros s'y attendait. En soi, savoir quelque chose qu'un héros ignore n'est pas un problème, mais dans ce cas il est bon de jouer là-dessus, et c'est en cela que cette révélation passe difficilement, on dirait même que les auteurs espéraient surprendre leurs spectateurs. De plus, les personnages secondaires sont très faiblement écrits, or, pour qu'un personnage principal soit intéressant, il est utile de le montrer en interaction avec d'autres personnages, des personnages caractérisés (simples ou complexes), or ici c'est comme s'il parlait à des murs. Seule la petite amie se révèle un peu plus creusée mais ces passages sont extrêmement brefs.
Pas d'objectif, pas trop de conflits car soit les obstacles sont insignifiants soit ils sont infranchissables. Cela n'empêche pas d'avoir quelques belles scènes, des passages touchants, et puis toujours ce personnage principal intéressant. Mais clairement la deuxième partie est moins inspirée. Elle est même peu crédible : comment notre héros peut-il s'adapter aussi facilement à la vie américaine quand il a vécu reclus si longtemps chez lui? En fait, c'est comme si chaque bonne idée des auteurs était abandonnée : le fanatisme en est un autre exemple, car une fois la rencontre effectuée, on regrette que le héros ne soit pas plus invasif, qu'il ne commette pas plus d'erreur à cause de son obsession.
L'humour aide beaucoup pendant tout le film. C'est un peu moqueur : d'baord on se moque des lacunes du personnage principal, puis on se moque un peu du monde dans lequel il vit, notamment au travers des programmes télés, et pour finir on se moque des américains qui sont à peu près tous un peu cons (surtout le jeune acteur). C'est bien. Mais je pense que ça aurait pu être poussé plus loin, que ça manque de jusqu'au-boutisme.
La mise en scène est sobre et globalement efficace. Mais ça aurait pu être plus poussé. Il y a de nombreuses scènes qui consistent en de simples champs et contre-champs alors qu'il aurait été bon d'insister sur des petites choses. Par exemple, à aucun moment on ne voit le héros observer son idole et pourtant ç'aurait été l'occasion 1) de creuser ce thème et 2) de casser un peu le côté plan-plan du film, d'avoir un point de vue plus approfondi.
John Hurt est impeccable ; Fiona Loewi se débrouille bien, surtout que ses moments importants sont très brefs, elle parvient à transmettre l'émotion nécessaire en quelques secondes ; Jason Priestley, je n'ai absolument rien contre lui, j'aime bien sa gueule qui ici convient bien au personnage qu'il interprète mais le pauvre bougre a le personnage le plus inintéressant du film ! Je ne sais pas si c'est parce qu'il ne jouait pas assez bien, on aurait supprimé alors des scènes et réécrit d'autres, ou bien si c'est juste le scénario qui est mal foutu à la base, en tous cas, le pauvre n'a aucun moment de gloire, son personnage ne fait que montrer ses beaux yeux, ne dégage absolument rien. C'est peut-être voulu, pour contraster entre les personnages qu'il interprète toujours de manière exagérée et celui qu'il serait 'réellement', je ne sais pas, en tous cas sa prestation est très pauvre.
Bref, ce film démarrait si bien mais arrivé à la moitié il ne se passe pratiquement plus rien, les auteurs peinent trop à exploiter leurs idées. Heureusement, ce n'est pas déplaisant à suivre (à part peut-être la fin un peu longue) notamment grâce à une petite dose d'humour là où il faut.