Adaptation à double tranchant.

Le maître mot de cette adaptation dans les mains de Joe Wright est sans nul doute l'originalité. Véritable mise an abyme, un théâtre dans un théâtre, Anna Karénine est déroutant. Pourtant, la mise en abyme est excellente pour montrer aux spectateurs une Russie des apparences ou chacun se montre tel qu'il a intérêt à se montrer.
Je n'ai pas encore (à mon grand regret) lu l'oeuvre de Tolstoï alors je serai incapable d'en parler en profondeur. Tant mieux dans un sens ? Une adaptation se doit-elle toujours d'être fidèle à l'oeuvre ? Est-ce que c'est vraiment cela qu'on recherche, le bouquin sur un écran ou une vision nouvelle sur celui-ci ? Néanmoins ici, elle l'est relativement. Anna ne se sent pas à sa place dans ce monde auprès d'un mari aimant mais avec lequel tout est insipide. Elle rencontre Vronsky et prend vie au fur à mesure que leur passion avance ce qui la mènera à son déclin puis à sa mort.
A l'écran, on retrouve Keira Knightley, Jude Law et Aaron Johnson (pour ne citer qu'eux). Plutôt admiratrice du travail de Keira, je ne l'es pas trouvée à son avantage dans ce film d'époque où elle excelle d'habitude. Ses mimiques sont assez énervantes par moment, elle surjoue, marquée au fer rouge de son précèdent rôle dans A Dangerous Method. Jude Law est bon, même très bon dans le rôle d'Alexis Karénine. Il y prouve qu'il est un acteur, un vrai et pas seulement une belle gueule. Aaron Johnson tout droit sortit de Kick-Ass est assez inconsistant. Pas assez bon pour qu'on y croit mais assez pour tenir, du moins pendant la première demie-heure du film.

Anna Karénine se révèle être d'une beauté esthétique mais surtout chorégraphique assez impressionnante. Les scènes de danse sont magnifiques, les décors, les costumes également (récompenses bien méritées à cet égard.) C'est une fresque visuelle et c'est peut-être ce qui sauve l'ensemble du film, qui lui donne une crédibilité car les défauts sont là. Défauts de jeu, et l'ennui, l'ennui s'installe. On a du mal à y croire, on a du mal à s'enticher des personnages. D'Anna qui laisse son fils en plan pour une amourette pardon un grand amour, de Kitty qui tombe amoureuse (sur le tard) de Nikolai. Attention, je ne remet pas en compte l'histoire de Tolstoï mais plutôt son manque d'intensité retranscrit à l'écran. On a du mal à y croire. Faute à la mise en scène qui se prend à son propre jeu, faute du jeu d'acteurs ? A cet égard, Matthew Macfayden aux côtés de Keira Knightley après Orgueils et Préjugés, ça vaut le détour et ça tirera sûrement un sourire ironique à certains (la différence de degré entre les deux adaptations de Wright est flagrante, Karénine étant très clairement en dessous) mais je digresse.

En somme, le film se regarde et se révèle être assez moyen, mais distrayant visuellement. Il mérite d'être regardé pour la mise en scène de Joe Wright qui est flamboyante et déroutante à la fois. On a le choix, soit on se laisse guider ou soit on le fait pas. Cette adaptation ravira les sens de certains et en fustigera d'autres.
En tout cas, elle brille par son originalité revendiquée et par un esthétisme soigné.