Liqueur à l'Aneth - ça m'a saoulé

Convaincu d'avoir assisté à un beau travail audio-visuel, je suis pourtant resté hermétiques aux charmes prétendus de ce film, qui a pour moi manqué d'un élément crucial : donner la vie en racontant quelque chose. L'écriture n'était pas bonne. "Si vous voulez rire, crier, pleurer, chanter, vous émerveiller, faites le dans votre tête". Cela tombe bien, je n'ai ressenti aucune de ces émotions. Le film fait chanter à ses comédiens ce qui est sensé être et qu'il n'arrive pas à montrer, ni à faire croire : "nous sommes amoureux", "nous sommes en plein doute", "j'ai des doutes sur ma carrière", sans jamais que l'on y croie a priori ou a fortiori. On me dira que l'objectif du film n'est alors pas de dresser des portraits psychologiques ou humains mais de montrer quelque chose sur la célébrité, la monstruosité, la créativité, le couple, devenir parent. Mais montrer quoi ? A qui cela parle-t-il, de quoi cela parle-t-il, qu'est ce qui est vraiment montré, dit ? Le vide humain, le vide de sens et de problématique porteuse n'aident pas ce drame musical à décoller, à faire adhérer, à faire illusion, à donner vie, comme à l'image d'Annette qui n'est pas vraiment une petite fille vivante, de chair et d'os. Adam Driver joue et chante bien, mais ne joue et ne dit en fait rien. Marion Cotillard a hérité d'un rôle vide et plat. A aucun moment ce qui se passait à l'écran ne disait quelque chose de plus que ce qui était chanté, jamais ce qui était chanté n'apportait plus que ce qui se passait à l'écran. Le film a selon moi manqué de subtilité, ou est demeuré au contraire tellement cryptique qu'il me faut me creuser la tête et prêter des intentions, des symbolismes à l'auteur pour y trouver quelque chose à retirer. Je n'aime pas que l'on nous serve des films à morale, des films à réponses, mais je n'aime devoir faire la démarche de sur-effort pour donner un intérêt au film qui ne fait aucun pas vers moi.
J'ai l'impression que l'auteur n'avait pas grand-chose à raconter, et que cela se sent davantage lorsque c'est du vide que l'on fait chanter aux comédiens.
Le salut du film réside en ses belles lumières, ses drôles de décors, le choix des couleurs, son son léché et quelques instrus bien senties qui m'ont fait battre la mesure de la main... Il démarrait bien, en donnant à ses protagonistes une belle ampleur grâce à un mystère, une distance, des silences dans des décors simples, éclairés simplement, avec des palettes de couleur complémentaires et épurées. Aussi la première scène de stand-up de Henry était pour moi originale, peu drôle, gênante mais pas moins bonne pour autant.
Enfin, les deux seules étoiles sur dix reviennent à la gamine (la vraie, pas l'effrayante marionnette) jouant Annette à la toute fin du film. Enfin du jeu, enfin j'y ai cru, mon coeur a battu, je me suis dit "quelle justesse, quelle émotion, elle est si petite ! La pauvre, comprend-elle ce qu'on lui demande de jouer et qu'elle le joue si bien ?". J'aurais presque envie de couper tout le reste du film pour ne garder que cette belle scène de fin.