Oui bah t'inquiète pas pour ça.
Bien, posons en deux phrases mon avis général sur l'oeuvre de Carax :
Je déteste ses films, ils sont à mes yeux d'un ego-trip pompeux camouflant vainement un vide palpable, ils sont pour moi des films qui se donnent l'air de dire des choses pour les cinéphiles rhétoriciens qui veulent pouvoir mettre un nom sur "le vrai bon cinéma" se suffisant de l'apparence de celui-ci. De surcroît, j'ai un profond désaccord avec les nombreux avis qui assènent "je comprends qu'on puisse ne pas aimer (ou pire !) ne pas comprendre Carax etc..." Je pense que je le comprend très bien, et j'affirme sa vanité dans les deux sens du terme : vain et orgueilleux.
Alors brièvement, pourquoi Annette ne change pas la donne ?
En une phrase, et je reviendrais ensuite sur ces qualifications une par une, Annette est pour moi un film à la réalisation grossière, sans propos et qui pourrait être imaginé par un lycéen nihiliste.
Un film à la réalisation grossière : Sur beaucoup d'aspects, ce n'est pas tant le projet visuel que leur réalisation qui me paraît ratée. La gestion de la lumière par exemple, dont je crois voir la tentative initiale, se gâche elle-même par un trop plein de mises en avant qui génèrent des contrastes trop prononcés rendant parfois certaines zones du plan opaques dans l'obscurité tandis que le(s) sujet(s) est presque surexposé.
Il y a une évidence dans l'utilisation des différents effets qui me laissent au mieux de marbre, au pire insulté. Les ralentis façon films des années 30, les chorégraphies anxiogènes (au mauvais sens du terme), la colorimétrie qui vomit son vert-théâtre/corruption et en sature la photographie sont autant d'éléments sans finesses qui gâchent des projets visuels potentiellement intéressants.
Enfin, le film hurle son inventivité de telle sorte qu'il m'est venu à plusieurs reprises l'idée d'un certain assassinat de la subtilité. La scène de l'orage sur le yacht, par exemple, échoue en voulant tant en faire. La réalisation est intéressante, mais reste gâchée par la grossièreté au sens propre de sa mise en œuvre. C'est tellement que c'est trop évident et cela en devient de la mauvaise réalisation (au sens de la mise en scène ici).
Trop souvent, la réalisation de Carax me paraît être une sorte de saturation de Wes Anderson, car sans le côté fantaisie/fantastique de ce dernier.
Sans propos : De manière générale, en parlant de réalisation en lien avec la sémantique du film, il me faut avouer que je me suis questionné pendant tout le film sur l'utilité de bon nombre de plans. La construction même du récit qui est parfois profondément ratée ( exemple : un long et superbe travelling pendant un trajet en moto, entrecoupé d'une scène du couple qui se ballade en forêt puis d'une scène du couple qui se ballade dans son jardin. Franchement, à part me dire "t'as vu le plan que j'ai su faire ?" je me suis rarement autant dit qu'un plan ne servait à rien ).
Il y a toujours, comme dans ses autres films, ce sentiment sous-jacent que quelque chose est profondément critiqué et pourtant... et pourtant rien. Les réflexions sur le comédien et son public s'évanouissent du fait que ce lien n'est jamais établi comme faisant écho à notre réalité, de même pour tout le reste. J'ose le rappeler : il y a nécessité, au cinéma, de créer pour critiquer ! C'est sympa d'avoir un film qui me dit "Alors tu vois, là je critique la célébrité" mais ça ne marche juste pas comme ça.
Il n'y a qu'un personnage, sans nuance qui plus est. Je trouve pas ça vraiment intéressant de n'avoir fait que des personnages-fonctions pour le protagoniste. Rien de plus à dire sur ce sujet.
La musique : Oui, c'est sûrement très bien. Je ne suis pas particulièrement fan des Sparks ni de ce style de ce musique et comme je suis pas du tout calé pour critiquer les comédies musicales car je passe vraiment à côté, je vais quand même tenter de critiquer cet aspect à l'aide de mes connaissances sur le cinéma seul. Je pense que dans une comédie musicale, la musique n'est pas juste un choix de format mais doit pouvoir apporter des choses en plus au projet narratif (et visuel avec les chorégraphies, bien sûr). Par exemple, les constructions rythmiques et rimées peuvent apporter une anxiété aux dialogues qui se retrouvent enfermés dans une codification qui empêche les personnages de s'exprimer complétement. Ici, c'est l'inverse. Les chansons racontent littéralement l'histoire.
"On est amoureux, on s'aime, là il se passe ça, là je pense ça..." J'ose également rappeler cela : au cinéma pour dire ce genre de choses, on le montre. Si on veut le dire, on écrit un texte. J'ai entendu de certains que "la beauté du film ne se trouve pas dans sa cinématographie mais sa composition musicale" eh bien, dans ce cas là, il fallait faire un album, pas un film !
Ces éléments cantonnent, pour moi, Annette à une comédie musicale pub-de-parfum.
Point final sur les critiques positives que j'ai lues jusqu'ici : Pour beaucoup, j'ai lu la qualification d' "expérience de cinéma". Un choix de mot particulièrement intéressant qui illustre pour moi toute l'essence de l'effet Carax. Dire que ce film est une "expérience de cinéma", c'est une très bonne façon de dire du film tout le bien qu'on en a envie, sans savoir pourquoi.
Itération d'une ode à la facticité, tout le comme le cinéma qu'il prône.
Annette semble critiquer quelque chose, facticement, tout comme il présente un intérêt factice, le tout pour une subversion toute simulée.
Finalement, l'effet Carax se résume parfaitement dans son propre message. Cette première phrase qu'il prononce lui-même : "Nous demandons votre attention la plus complète."
Désolé, mais les années ne me font pas trouver une seule raison pour laquelle je devrais la donner.