Pas vraiment déçu du film, mais clairement une sensation d’inachevée à la fin. Déjà, premier point : il est clair que vendre ce film comme un film d’horreur tient presque de l’arnaque. On est plutôt dans un thriller à énigme, qui a aussi le défaut de souffrir d’un problème de structure majeure. À savoir que l’histoire qu’il met en place est très intéressante, et en effet effrayante dans les dérives qu’elle met en avant. Elle joue un rôle social important et s’adresse à tout le monde. La première partie crée une atmosphère et une ambiance assez redoutables dès les premiers instants, et à l’image de la protagoniste principale, on est déstabilisé : on se doute que quelque chose ne va pas avec ces reconstitutions historiques, sans vraiment parvenir à mettre le point dessus. La force du film, c’est de ne pas essayer de nous donner des pistes ou des indices, ce qui renforce l’idée que les personnages savent et nous tiennent dans l’ignorance, ce qui accentue le malaise face à certaines scènes.
Et cette première partie sera sans doute la meilleure, parce qu’elle sera la plus efficace dans ce qu’elle essaie de mettre en place, et qu’elle prend un tout autre niveau de lecture quand on arrive à la fin du film. Un niveau qui en devient encore plus effroyable. C’est pour ça que je parlais de « presque de l’arnaque », parce qu’on peut comprendre l’approche une fois qu’on arrive à la fin, où on appréhende tout juste l’horreur de ce qu’on vient d’assister. Le soucis, c’est que l’horreur n’est ni le genre principal du film ni de son intrigue. C’est parfaitement illustré par la seconde partie, qui nous révèlera donc la vérité, mais qui est insérée de façon bien maladroite, ce qui casse la tension. Parfois trop longue, trop déconnecté avec le reste de l’intrigue ; peut-être aurait-il mieux valu jouer sur des flashbacks sporadiques (façons rêves éveillés), pour ne garder la révélation qu’à la fin et la rendre d’autant plus terrifiante.
Certes, le film aurait été écourté d’une bonne demi-heure, et ça aurait été dommage parce que certaines scènes de cette seconde partie sont vraiment chouettes et apportent un message intéressant ; mais le film aurait mieux fonctionné dans son ensemble. Et sa conclusion aurait été, je pense, plus efficace. Parce qu’en l’état, on en revient à la fin de la première partie pour poursuivre l’intrigue (et la coupure en devient donc beaucoup trop longue) et conclure l’arc du personnage. Une conclusion qui parvient à bien jouer sur la tension et cette effet libératoire de la révolte, la réaction quasi-viscérale de la protagoniste. Mais à côté, on se retrouve avec un « duel » final sorti de nulle part avec un personnage peu intéressant et sans de réelle tension scénaristique (quoique, ça illustre bien le discours ouin-ouin des suprémacistes blancs), du coup ça perd un peu de son effets.
Le casting est dans l’ensemble plutôt correct, même si ça se joue surtout entre Janelle Moná et Tongayi Chirisa pour porter le film. La musique est sympa, mais on retiendra sans doute le thème principale, qui participe plutôt à bien à créer cette ambiance générale. J’ai vu pas mal de critiques sur la mise en scène, et c’est vrai que si elle n’est pas révolutionnaire et assez classique le plus souvent, elle propose quand même plusieurs scènes et plans plutôt efficaces (le plan-séquence à l’intro en particulier, mais aussi la séquence de fin), et j’ai beaucoup aimé la photographie (ainsi que les décors) à de nombreux moments, car elle donne un côté artificielle à la plantation, renforçant le malaise.
Bref, un film loin d’être parfait, qui aurait sans doute pu aller encore plus loin, mais dont le principal défaut est sa structure globale, avec cette deuxième partie qui vient un peu tout briser ce qui avait été mis en place avant, en termes de tension narrative. Il y avait sans doute mieux à faire avec, c’est dommage. Il n’en reste pas moins une œuvre qui porte un message social qui devrait être écouté par tout le monde.