Christine Boutin (6 février 1944 – 10 mars 2016) ( Que Dieu me pardonne ! )

Je vais devoir ici tenir un langage de vérité afin d'avoir une infime chance de trouver ma place au paradis, si je veux que Dieu, dans sa miséricorde, me donne l'absolution. Car j'ai péché, très gravement péché.


Vous n'êtes pas sans connaître ma proximité avec Christine Boutin, ma « princesse ». Oui c'est ainsi que je l'appelais.


Comme bien souvent, nous nous sommes retrouvés, hier au soir, Christine, son merveilleux cousin et moi, en mon modeste logis, pour une picaresque soirée raclette. Ah ça elle aimait la raclette ma Christine, et la choucroute aussi, le cassoulet. Enfin bref passons, je m'égare.


Comme à notre habitude, nous avons débuté la soirée en grignotant quelques amuse-bouches avec un doigt de Porto. Juste un doigt, même si Cricri aimait bien un Porto d'abord.


Puis ce fût la raclette avec sa farandole de pommes de terre, de jambon cru de Savoie, de rosette de Lyon, de merguez de Tunis. Ah non pas de merguez, allez savoir pourquoi, Christine y est allergique. Approchez-une de son visage et elle se met à enfler tel Pierre Richard dans "La Chèvre".


A table nous avons refait le monde, déclamé la Bible, seul rempart possible pour contrer la main du malin. Ce malin qui fait actuellement tomber la foudre sur nos âmes perdues. J'entends encore ma princesse me dire : "Tous ces migrants, ces terroristes qui mettent à feu et à sang l'Occident, qui assassinent des chrétiens par centaines de milliers, ne sont que le bras armé de Belzébuth. Nous avons fauté, nous payons en retour."


Bien entendu nous n'avons pas oublié de prier pour les homosexuels, ces âmes perdues, ces brebis égarées. Satan les habite, à n'en pas douter. D'ailleurs qui ne s'est point un jour réveillé en se disant "Satan m'habite" ? Ainsi que pour tous nos autres frères et sœurs également touchés par la maladie et le handicap.


Nous aimions à conclure nos soirées au salon, dégustant salade de fruits frais et tisane ou autre verveine. Et c'est là que, systématiquement, Christine ma divine réclamait sa petite sucrerie : un film. En effet elle adorait mon gros... écran.


Notre manège était bien réglé, et à tour de rôle, nous choisissions une œuvre. Inutile de vous le cacher, quand venait le tour de Christine, il n'y avait qu'un choix possible : "La Passion du Christ". C'était si beau de la voir ainsi, transie de larmes, s'agenouiller devant notre Rédempteur.


Mais hier, c'était à moi de choisir et là ce fut le drame. Possédé probablement, je n'ai pas jugé bon de vérifier ce que j'allais mettre sous nos yeux. Mon petit trésor aimait rire, alors je tentais chaque fois d'assouvir son désir. C'est ainsi que je me suis dirigé vers ces maudits Chiens de Navarre, une troupe théâtrale qui avait pour réputation de pratiquer l'art du burlesque comme personne. Je n'en savais pas plus mais advienne que pourra.


Ouverture : un barbu, un jeune homme aux cheveux longs et une blonde péroxydée, tous trois affublés d'une robe de mariée, entrent dans le bureau du maire et lui enjoignent de les unir. Je suis pétrifié. Non, pas le mariage pour tous, pas maintenant, pas avec elle assise à mes côtés. Son mari-cousin se racle la gorge, Christine, elle, déglutit difficilement. Bref le malaise est palpable.


Scène suivante : trois patineurs cagoulés façon catcheurs dansent sur la glace... dans le plus simple appareil. Nus quoi, à oilpé, deux attributs masculins virevoltent ainsi dans le vent glacé, accompagnés d'une foufe rutilante.


A cet instant Christine rentre en "Apnée" et ne respirera plus durant presque une heure, soit le record du monde largement en poche.


Je ne sais pas si elle verra ces affreux hippies, Céline, Thomas et Maxence, se vautrer ensemble dans la luxure et la baignoire d'un magasin, si elle les entendra proférer des insanités sans nom. J'en viens même à souhaiter qu'elle ait échappé à la suite de leurs pérégrinations et à leurs élucubrations odieuses, aux apparitions de personnages démoniaques, à l'image de ce gros facteur poilu du menton monté par, non pardon comme, encore pardon, sur un âne, et qui finira avec comme simple couverture un slip, servant de modèle aux dévots, soudain aspirés par l'envie irrépressible de peindre. Je pense aussi qu'elle aura échappé à la vision de ce prêtre prenant à pleine bouche la catin Céline.


Et survint la 58ème minute fatale à ma princesse : elle se leva d'un bond, probablement secoué par le spasme de trop, à la vision du Christ en croix, baillant et s'étirant au sortir d'une longue nuit de sommeil, balbutia sur ses jambes devenues soudain trop fragiles pour soutenir ce petit corps empli de chagrin et de colère, et s'écroula, terrassée, sur le carrelage froid.


La suite ne fut que prières, pleurs et cris, mais rien qui ne ramena ma princesse à la vie. Tel un ange, je la vis enfourcher un nuage et se diriger tout droit vers les cieux.


Ainsi aura-t-elle échappé à la scène du mariage, à l'orgie qui s'en suivit, où nains, géants, personnes âgées, dégénérés s'affrontaient dans de frénétiques combats de catch.


Sont-ce ces comiques catapultés des enfers qui ont tué ma Bouboute ? Ou moi par mon inconscience, ma désinvolture ?


Toujours est-il que depuis le drame, entre deux ablutions, je me couche sur une paillasse et me fouette avec des orties fraîches. Ceci ne te ramènera pas ma princesse, ton sort est dorénavant entre les mains de notre Seigneur. Et le mien aussi. Libre à lui maintenant de me laver de mon péché ou de me clouer au pilori éternel.


Pour le souvenir...


Pour le charme...


Pour la grâce


La liste "hommage"

takeshi29
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le 11 mars 2017

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takeshi29

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