Ascension par Voracinéphile
Vu l’incroyable pessimisme et le jusqu’auboutisme d’un tel pitch, Ascension a l’air passionnant. Et il l’est, à bien des niveaux. Comme toujours, Hussein foisonne d’idées trash poétiques, et le thème d’une humanité ayant accès à une forme de magie l’inspire énormément. Toutefois, contrairement à Subconscious, Ascension n’est qu’une seule histoire, qui suit trois rescapées qui ont chacune vécue horreur et souffrance. On ne sortira donc jamais de l’usine, gigantesque bâtiment silencieux et véritable dédale d’escaliers qui montent tous vers l’inconnu. Autant dire qu’il y a immédiatement une portée métaphysique qui s’installe, la destination de cette ascension demeurant mystérieuse. Si Dieu est mort, qu’y-a-t-il en haut ? Nos trois personnages sont partis pour le découvrir, et l’essentiel du film consiste à suivre leur ascension, à disserter sur leurs motivations pour continuer à avancer, à éplucher leurs espoirs, leur peine… Et l’occasion de remarquer qu’elles vieillissent de façon accélérée pendant leur montée, finissant littéralement en lambeaux dans les dernières marches. Je le répète, le film se révèle surtout fascinant pour sa poésie trash, s’attardant par exemple sur le passé de l’une des femmes, tuée et ressuscitée à de multiples reprises par son ancien compagnon. Un tel concept, une telle spirale de violence gratuite (si on ressuscite, la mort et la violence n’ont plus de raisons d’être réprouvés) aborde des thématiques fascinantes et sonde la noirceur humaine avec toujours cette poésie qui fait l’horreur des films d’Hussain. Une autre dissertera sur les enfants dieux, humains non finis qui se retrouvent à l’égal des hommes sans l’expérience, répétant les erreurs sans se donner la peine d’apprendre… Je reste personnellement sur la magnifique séquence tournée dans un champ où deux filles jouent à se poursuivre, la caméra les perds de vue un instant, et quand elle les retrouve, l’une est en train de battre à mort l’autre. Gratuit, mais la mise en scène et l’ambiance rendent la scène fascinante. Toutefois, et il est très important de le préciser, le maître mot du film est : « léthargie ». En effet, l’essentiel du film consiste donc à filmer des femmes qui montent dans un escalier et qui font des pauses de temps à autre pour parler chiffon. Pendant 1H42. Si vous contrôlez sur allociné, le nombre de mauvaises critiques décrivant un film chiant est éloquent. Effectivement, Ascension est chiant, à un tel point qu’il est polémique essentiellement pour ça. Est-ce de la masturbation intellectuelle trash ou une véritable œuvre poétique ? Je penche personnellement pour la seconde hypothèse, j’adhère au style Hussain. Toutefois, le réalisateur ne faisant aucun effort pour s’ouvrir au public (il va à fond dans son trip), cette mise en scène très théâtrale et lente peut passer pour de la prétention. Hussain s’en fout, il a conscience d’être borderline et ne pense qu’à épaissir son poème pelliculaire de visions macabres (les innombrables cadavres qui ont eux aussi tenté l’ascension métaphysique de l’usine). Nouvelle claque sensorielle qui nécessite vraiment d’être en forme pour être suivi jusqu’à son terme (je me suis endormi deux fois devant avant de parvenir au bout, magnifique musique hypnotique), Ascension est plus construit que Subconscious, il a une identité mieux définie aussi (ce n’est plus un attentat à la raison, c’est un regard pessimiste sur l’Homme), et il se révèle à la hauteur des attentes. Attention toutefois, l’objet est tel qu’il provoquera certainement des pétages de câbles devant l’inexistence d’un quelconque rythme…