Alien: Romulus
6.4
Alien: Romulus

Film de Fede Alvarez (2024)

On y est. Je peux dire que je l'avais attendu, je peux dire que j'avais des espoirs, je l'ai sûrement mérité. Non que je cède au désespoir, mais qu'après un remake comme celui d'Evil Dead, ou une formule comme celle du Massacre à la Tronçonneuse façon Netflix, Fede Alvarez ne peut plus faire illusion. C'est la confirmation de l'équation. Et c'est donc armé de 2 cannettes de bière savamment dissimulées que j'ai pu découvrir le bestiau, très satisfait d'avoir trouvé un cinéma à 7 balles la séance alors que le Pathé local proposait le même programme à 16.70€. Dans les salles, personne ne vous entend hurler.

Bon, pas de spoilers ici, car je ne suis pas là pour ça. On ne va pas tourner autour du pot : le film est correct. Recyclant le cadre du jeu Alien isolation (la station quasi déserte) avec l'esthétique d'Alien en reprenant tous les éléments des autres films de la saga (Prometheus inclus), le film est d'une facture visuelle très appréciable, et se paye le luxe d'avoir au moins 3 points originaux :

- Une intro d'une quinzaine de minutes qui nous montre le quotidien des colons d'un site minier

- Un traitement de l'androïde original qui se permet de modifier le comportement du personnage selon les mises à jour

- Une séquence d'action en gravité zéro, chose jamais exploitée encore dans la saga.

C'est globalement tout ce qu'il y a à relever, car maintenant, il faut affronter le monstre en face. Et hors de question de détourner les yeux, car le constat fait mal.

CE FILM N'EST QU'UN BEST OF DE TOUTE LA SAGA. Ca fait mal, mais le constat est clair. Si le film essaye de fluidifier sa narration, de multiplier les enjeux (au point d'avoir une trame double durant une partie du film) et de susciter l'attente du spectateur, il ne fait que recycler absolument tout ce qu'il met en scène. La trame du film ? Alien Isolation. Les armes ? Aliens le retour. La lumière orange ? Alien 3. L'hybride humain-alien dégueulasse ? Alien la résurrection (mais celui de Jeunet est infiniment mieux fait). Partout, la comparaison fait mal, car le constat est fatal : déjà fait, et pas en mieux. Chaque film alien avait fait son truc, avait réinventé son concept en le modifiant, en bricolant son machin, et en accouchant d'une chose qu'on n'avait pas vu avant. Même Prometheus ou Covenant (crus décriés que j'ai bien apprécié) faisaient du neuf, à leur sauce plus ou moins appréciée. Mais ici, tout est recyclé. Même l'hybride alien/humain d'alien 4 se retrouve mélangé à du Prometheus pour aboutir à la créature la plus moche de toute la saga (et c'est à se demander qui voulait voir un truc pareil). Tout l'univers d'Alien se retrouve ici régurgité tel quel et c'est particulièrement amer à constater. C'est exactement ce que la formule Disney nous promettait. Exactement ce que le semi étron Texas chainsaw Massacre de 2020 nous promettait. Un truc qui ne fâche personne, mais qui n'a aucune véritable saveur, se contentant d'être un best of de ce que les gens ont aimé.

Le pire défaut de ce film, en plus d'avoir donné à un androïde le visage de Ash via un swapface dégueulasse, c'est d'avoir recyclé telles quelles les punchlines cultes de la saga. "Je ne vous mentirai pas sur vos chances de survie, mais vous avez ma sympathie." Entre autres. Mais quand on arrive à une scène d'action où j’entends "Ne la touche pas..." Je me suis bouché les oreilles pour ne pas entendre la suite. Quel autre film alien s'est rabaissé à pompé ses prédécesseurs ? Aucun. Même Covenant qui faisait un remake d'Alien dans son dernier quart d'heure ne s'était pas abandonné à de telles bassesses. Ces répliques trop cultes rebalancées ça et là comme des clins d'oeils aguicheurs d'une grosse pute bouffie par le pognon facile qui veut nous rejouer encore la carte de la nostalgie, c'est un non. Pour cela, Alien Romulus (dont le nom n'a aucun foutu sens question figure mythologique dans cette saga) ne peut pas être appelé un bon film. Car il aurait fallu faire un film, même mauvais, pour être traité comme tel. C'est un bon best of. Avec des moyens et du savoir faire, ce qui le place au même niveau qu'Aliens le retour (le film d'action de la saga, sans fond mais efficace dans la forme tout en ayant créé la structure du nid et de la reine). Mais soyons honnête, le film de Cameron vaut mieux, car lui n'avait pas de modèle. Celui ci n'a rien inventé en dehors des points que j'ai relevé, c'est du recyclage perpétuel qui trouve son point culminant d'absurdité quand Prometheus se retrouve impliqué dans la trame via un tour de passe passe scénaristique sans aucune logique qui tente de raccrocher les wagons sans la moindre conviction, car on sait que ces sagas ne sont pas (et ne devaient pas être) entremêlées. Et là, c'est la foire à la saucisse, avec même le repompage d'un des scénarios abandonnés d'Alien 3 (oui, les cobayes du labo infectés).

Alien Romulus, c'est l'essorage final, le pressurage ultime d'une saga sur lequel on n'envoie plus des créateurs mais des sampleurs, qui nous répèteront le passé ad nauseam jusqu'à ce que le filon ne rapporte plus assez, auquel cas la saga mourra avec toutes celles que Disney aura décidé d'exploiter. Le résultat n'est pas encore désagréable, mais la pente est sacrément amorcée avec cet opus. Je ne sais donc pas si je dois souhaiter à ce film de marcher ou de se planter. Le résultat n'est pas affreux, mais son fond est monstrueux. Est ce le moment de faire mourir la saga ? Je crains qu'après l'échec critique de Ridley Scott à renouveler cet univers (réussi de mon point de vue, pas de celui du box office), on ne puisse s'attendre à rien d'autre que de la redite. Comme un navigateur bloqué qui nous envoie lentement mais sûrement vers le crash final.

C'était Vora, dernier survivant du Cinémaparadiso... à vous... terminé.

Voracinéphile
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le 14 août 2024

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