Requiem for a team.
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Los Angeles, un jour ordinaire dans une violence devenue tout aussi ordinaire la police massacre sans sommation des membres d'un gang. Justice expéditive et désincarnée (des policiers on ne verra que les canons des fusils) amorçant un cycle de violence du même acabit. De meutre sommaire en vengeance sourde un groupe hétéroclite d'individus se retrouve coincé dans un commissariat pris d'assaut par des membres de gangs.
La grande puissance du film est de proposer un mélange d'influences dense tout en restant un monument d'épure. La menace est ainsi sans visage, sans revendication, sans motivation, elle est également sans limite puisqu'on ne saura jamais combien d'individus font le siège du central 13. La menace est sourde, diffuse mais pourtant omniprésente. Dans le commissariat les survivants se connaissent à peine, ils ont même toutes les raisons de se haïr mais avec la survie vient la solidarité de circonstance. Les barrières tombent, le policier et le voyou ne sont plus que des hommes qui ont finalement beaucoup plus en commun qu'ils n'ont de divergences. Au delà du badge il y a la vraie justice, au delà des menottes il y a le véritable honneur. Là encore le scénario offre le strict minimum pour cerner les personnages, les actes achèveront de montrer qui ils sont vraiment. Difficile de trouver meilleure caractérisation que celle de Napoléon Wilson avec ce simple et jouissif "Do you have a smoke ?". Difficile de trouver plus noble que ce policier défendant coûte que coûte un type mutique et visiblement responsable du siège sans jamais demander de justification ni de compensation.
En plus d'un cinémascope d'une précision chirurgicale Carpenter use du contraste pour échafauder une ambiance oppressante. Il suffira de quelques notes de l'incroyable thème principal pour établir l'angoisse alors qu'on n'a encore rien vu. Plus tard les vitres éclatent, les murs se trouent mais pourtant aucun coup de feu ne résonne, la frénésie de destruction visuelle se heurte au calme sonore. La rue ne paraitra jamais aussi normale qu'en se vidant de ses cadavres. Les longues phases de tension répondent aux violents affrontements au fusil à pompe. La menace est dangereuse pas parce qu'on la voit mais précisément parce qu'on ne la voit pas. Le hors-champs est le royaume des créatures venant faucher les vies des survivants, inlassablement la bête revient toujours plus féroce, de moins en moins humaine. Elle est noire, elle est blanche, elle est hispanique, elle est abstraction.
Carpenter ne porte jamais de jugement, il traduit le malaise social en images cauchemardesques, il transpose un sentiment lancinant en vision tangible. Le contraste, tout le temps. Comme lorsqu'il arrive à filmer plein cadre la mort d'une innocente petite fille sans le moindre affect, sans la moindre dramatisation. Il place le spectateur face à l'horreur simple et pourtant totale de la situation, le laissant choqué, révolté, face à lui-même. Le film fut interdit à sa sortie en raison de son traitement dépouillé et frontal de la violence, jugé immoral. Que reste-il lorsque le jour se lève, pour la dernière fois, sur le commissariat numéro 13 ? Des héros, oui, mais pas de gloire et certainement pas de leçon de morale. Carpenter ne veut pas prendre le spectateur par la main, il cherche surtout à l'accompagner dans cette odyssée au bout de la violence pour que de cette folle escalade sorte peut-être, enfin, quelque chose.
Aux confins du film d'action, du western et du fantastique le jeune John Carpenter dépeint le crépuscule de la civilisation à travers ce dernier bastion d'autorité laissé à l'abandon. Rebelle mais pas écervelé, simple mais jamais simpliste, symbolique mais concret, brut mais élégant. Le film utilise les oripeaux de la série B à petit budget pour accoucher d'un manifeste qui n'a rien de citoyen mais qui a tout d'humain. Assaut contient déjà tout Big John, ce maître du cinéma de genre qui n'aura de cesse de tendre des doigts d'honneur au système. Tout simplement la première oeuvre majeure d'un cinéaste génial.
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Créée
le 21 janv. 2013
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