Atlas ou l'esthétique des bas-fonds

Entre le documentaire et le film expérimental, Atlas révèle un monde parallèle de drogue et de prostitution. De Kiev à San Francisco en passant par Mumbai ou encore Phnom Penh, Antoine d’Agata, cinéaste et photographe de l’agence Magnum, recueille durant trois ans les images et les paroles des prostituées qu’il fréquente. Le résultat est quasi hypnotique. Aux images en basse lumière se superposent en voix off les confessions de ces femmes qui expriment dans des langues différentes leur solitude, leur rapport au désir, leur peur de la maladie et de la mort. Eros et Thanatos.


Les corps se succèdent - corps meurtris, blessés, se piquant, se masturbant, s’accouplant. Ombres et lumière sculptent des formes à la Francis Bacon. Des chiens se dévorent. Dans ce monde marginal et sans issue, la chair semble le seul remède contre la mort. Une scène s'intercale comme une parenthèse explicative : le cinéaste, la tête dans un sac en plastique, étouffe sous la douche. Sans doute fait-il face à ses propres addictions et à sa vanité de « témoin inutile ».


D’Agata n’est pas le premier photographe à plonger dans ce monde interlope. Avant lui, Nan Golding a aussi tendu un miroir saisissant de la drogue, de la prostitution et de la violence - tout ce que notre société ne veut pas voir. Mais le projet de d’Agata tient davantage de l’odyssée mythologique. Atlas est une fable oscillant entre le sublime et l'horrifique, un tour du monde de la descente aux enfers.

Jérôme_Oren
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le 4 mars 2021

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Jérôme Oren

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