Pour son 31ème film, Clint Eastwood décide avec Au-delà de s'interroger et par la même occasion, son spectateur sur un thème qui semble l'interpeller à ce moment de son existence et de sa carrière : la mort et le questionnement qui gravite autour de cette thématique. Que ressentons-nous lorsque nous y sommes confrontés ? Quel impact cela a sur notre entourage même après des années de séparation avec l'être disparu ? Quelle est l'importance du processus de deuil pour les proches encore en vie ?
Le cinéaste va donc avec différents récits poser ces questions, le film ne promet aucune réponse, seulement des hypothèses. À partir de ce support que l'on nous propose, c'est à nous d'effectuer ce travail de réflexion sur ce sujet sensible en se basant sur notre propre expérience et notre ouverture d'esprit.
C'est à travers ces 3 portraits différents qui ont côtoyé la mort qu'Eastwood va nous plonger dans cet univers.
Une journaliste française victime du Tsunami de 2004, faisant l'expérience directe de la mort. Un événement qui changera sa vie à jamais. En en tant que reporter, elle voudra comprendre et explique aux autres via l'écriture d'un livre cette expérience de mort imminente qu’elle a vécue. Une quête qu'elle va devoir mener malgré l'incompréhension totale de son entourage.
Un ancien médium plein de compassion qui communiquait avec les défunts s'est reconverti dans la manutention, ce don ou cette malédiction l'enrichissait, mais l'empêchait d'avoir une vie stable et équilibrée. Se sentant incompris par son frère qui lui veut continuer à tirer profit de ce talent. Il va essayer de changer de vie tout en essayant de faire oublier cette particularité.
Un jeune garçon a perdu son frère jumeau lors d'un accident de voiture. Pour lui, il sera question de la recherche du deuil en essayant d'avoir un contact avec son frère. Le symbole de cette quête est cette casquette qui est le seul héritage que lui a laissé son frère qui est représentatif de ce manque et de sa peine.
Nos personnages principaux vont être confrontés aux charlatans qui tirent profit du malheur des autres, à l'incompréhension des proches, les dangers de l’information diffusés sur internet et qui sont à la portée des enfants, mais aussi au point de vue scientifique qui travaille sur les EMI (expériences de mort imminente) et sur ses conséquences sur le comportement de ceux qui l'ont vécu. Le réalisateur essaye de traiter son sujet avec nuance afin de ne pas partir dans des extrêmes, de nous permettre d'avoir la vision la plus globale et la plus juste possible.
Techniquement, le film est maîtrisé de bout en bout. La scène d'introduction nous plonge directement dans le bain (sans mauvais jeu de mots). Le metteur en scène n'hésite pas à être au cœur de l'action en plaçant sa caméra en vue subjective pour nous faire vivre une immersion totale.
Les transitions et le montage entre chaque récit sont parfaitement fluides, on passe d'une histoire à l'autre avec aisance, l'ambiance de chaque pays est bien retranscrite, peut-être légèrement cliché pour le côté français avec un thème musical qui aurait mérité un meilleur choix.
Le scénariste Peter Morgan, à réalisé un travail d'écriture très intéressant au niveau des protagonistes et du récit en effectuant un savant mélange entre analyse pragmatique et émotion. Les personnages de George et des jumeaux (Matt Damon et les frères Mclaren sont excellents) sont le côté émotionnel de l'histoire, leurs vécus et leurs aspirations arrivent à nous toucher profondément. Celui de Marie Lelay (Cécile de France) est quant à lui le côté intellectuel du film, celui qui va nous aider au travers de ses recherches à rationaliser le sujet et à faire appel à notre réflexion.
Concernant la musique hormis le petit bémol que j'ai cité un peu plus haut, accompagne très bien l'histoire. On parle souvent de Clint Eastwood pour ses talents d'acteurs et de réalisateur, mais on oublie le musicien qui à chaque fois créer des compositions simples de quelques notes de piano (Millions Dollar Baby, L'échange, Mystic River...) mais qui sont efficaces et donne au film un plus indéniable qui contribue à transmettre l'émotion.
Le titre Au-delà, d'après ma propre interprétation du film, ne fais pas forcément référence à ce qui se passe après le décès d'un être humain même si c'est évoqué, mais plutôt à ce qui se passe après, pour les êtres encore en vie. Leurs manières de gérer un drame dont ils ont fait l'expérience ou dont ils ont été témoins.
La signification du dernier plan serait celle-ci : la mort fait partie de la vie, en aucun cas, elle doit être un frein, mais un moteur pour profiter pleinement de chaque jour sur terre, car on ne se sait jamais de quoi demain sera fait.