Taxi sniper
Revu il y a trois ans et massacré par une note divisée par deux, je me devais de redonner sa chance à Collatéral : au sein d’une intégrale consacrée à Mann surgiraient peut-être de nouvelles ébauches...
le 23 juin 2016
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En 2004, Michael Mann réalisait avec Collatéral, l’un des polars les plus jouissifs du cinéma américain et par la même occasion l’un de ses meilleurs films. C’est dans la cité des anges, le terrain de jeu favori du cinéaste, qu’il nous plonge dans ce thriller.
Dans le film, Los Angeles n’est pas qu’une simple ville, c’est un personnage à part entière, qui fait partie intégrante de l’histoire. Le maître des plans urbains, montre la métropole avec ses caméras numériques de la plus belle des façons. Il nous fait voyager avec ses plans aériens, pendant que Max roule à bord de son taxi, on a l’occasion de contempler l’architecture de la ville. La qualité esthétique est d’autant plus présente lorsqu’il filme en milieu nocturne, L.A ce réveil et s’embellit. On en prend plein les yeux avant même que la trame principale du long-métrage se déroule.
Côté mise en scène, tout est toujours aussi précis et soigné chez Michael Mann. Dans le taxi ou on à le droit presque à un film à huis clos où les deux protagonistes se jaugent, apprennent à se connaître d’une façon peu conventionnel. Jusqu’à cette scène dans la boîte de nuit où la tension et l’action sont plus que palpables avec la musique Ready Steady go qui contribue à se ressentit.
En parlant de la musique justement, la bande originale dont James Howard Newton est l’artisan de quelques morceaux, comporte d’excellents thèmes musicaux. Je pense notamment à :
Briefcase: au début du film quand Max prend son service, la musique se mélange avec tout ce bruit autour du personnage, au moment où il
ferme la porte de son taxi la musique s’arrête, le calme reviens il
n y a plus que lui, prêt à partir.
Hands of time : une autre chanson très parlante, cette musique est apaisante. La nuit est tombée, ça roule assez facilement et après avoir eu une journée plutôt éprouvante Max fait la connaissance d’Annie Farrell, le temps du trajet cela va être l’un comme pour l’autre un moment de détente et d’apaisement avant de repartir chacun à leurs occupations.
Air : présent au moment ou Max transporte Vincent pour remplir son premier contrat. Ce thème réalisé au piano, annonce comme le calme avant la tempête pour Max, après cela rien ne sera plus jamais pareil pour lui.
Bien sûr, on ne parle pas de Collateral, sans la fameuse scène avec les coyotes, c’est shadow of the sun qui accompagne ce passage magnifique, ce bref moment qui marque une pause au milieu de toute cette agitation, un instant sorti de nulle part dont les protagonistes contemplent et admirent sans dire un mot.
Côté casting, Michael Mann a toujours su très bien s’entourer, et ce n’est pas avec Collatéral qu’il dérogera à la règle. Les acteurs nous offrent de vrais rôles de composition à l’image de Tom Cruise. À la demande du cinéaste, celui-ci a effectué un changement radical de look, avec une chevelure grise et barbe naissante. Mais également au niveau de son jeu. Afin de paraître plus crédible dans son rôle de tueur à gage et pour passer inaperçu, celui-ci s’est fait passer pour un livreur Fed Ex dans un centre commercial et a eu pour mission de ne pas se faire reconnaître, il s’est également entraîné à suivre des techniciens du tournage pendant des semaines, connaître leurs emplois du temps pour finalement leur coller un post-it sur la nuque. Il a aussi reçu une formation auprès d’un conseiller technique, ex membre d’une unité d’intervention spéciale pour apprendre à tuer un homme à main nu, au couteau et au pistolet, ainsi qu’à s’échapper rapidement d’un lieu (le même consultant avait été engagé pour Heat).
Jamie Foxx a lui aussi bien travaillé son rôle, il a piloté une Ford Crow Victoria afin de paraître le plus à l’aise dans son rôle de chauffeur de taxi. C’est lui-même qui a effectué sa cascade lorsque le véhicule fonce à toute allure dans les rues de L.A
Comme chez Michael Mann tout est d’une minutie extrême, même les rôles secondaires sont mis à contribution, Jada Pinkett Smith qui interprète le rôle d’Annie Farrell, a passée quelque temps avec une avocate, et à observée sa gestuelle, ses rapports avec ses collègues mais aussi son comportement dans et en dehors du tribunal.
Le reste du casting est complété par l’excellent Mark Ruffalo, Bruce McGill, habitué de la filmographie de Mann (Révélations et Ali), Barry Shabaka Henley qui est un autre fidèle du réalisateur ( Ali et Miami Vice ) sans oublier le caméo de Jason Statham
Max est effacé, il est enfermé dans son quotidien de chauffeur de taxi, mais prend son travail très au sérieux, aspire à des ambitions professionnelles qu’il ne réalisera jamais, surement par manque de témérité, il se ment à lui-même et aux autres.
Vincent est un homme d’action, son quotidien n’est pas du tout redondant, il agit et improvise en fonction des situations qui se présentent à lui. C’est également un homme pragmatique sur le monde qu’il entoure, il en est même presque pessimiste.
Bien qu’ils soient diamétralement opposés, je vois ces deux protagonistes comme une seule et même personne. Vincent peut être vu comme le moi intérieur de Max, cette part de lui-même qui le pousse à agir, à prendre les choses en main, à être fort et à se dépasser. Je pense à ce moment où Vincent pousse Max à envoyer balader son patron parce que celui-ci veut lui faire rembourser les dégâts qu’a subi le taxi.
Ce passage bien marquant ou Vincent conseil Max d’appeler Annie, car la vie est courte mais celui-ci ne sais pas si il va le faire. On peut remarquer à ce moment que Vincent est placé juste derrière Max et pas en diagonal comme dans les autres scènes. La caméra se resserrant bien sur leurs visages, comme si Max se parle à lui-même.
Max évolue clairement au contact de son ravisseur. Au début pris en otage, il va subir ses agissements, mais au fur et à mesure, Max va prendre confiance en lui et ira jusqu’à se rebeller une première fois en détruisant les fichiers de Vincent. Cet acte met définitivement fin à sa position de victime.
Une autre situation va contribuer au changement du personnage, le temps d’une scène, il va prendre la place de Vincent, l’imiter et agir comme lui. Pour la première fois du film Max prend les choses en main et c’est Vincent qui subit la situation.
Max ira encore plus loin en tentant de sauver Annie et par la même occasion défier Vincent.
Collatéral, c’est l’addition d’une réalisation parfaitement maîtrisée, une mise en scène millimétrée, une bande originale prenante, des acteurs excellents et pleinement engagés, un scénario bien ficelé. En somme, tous les ingrédients permettant de passer un très bon moment.
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Créée
le 24 oct. 2015
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