Angelina Jolie réalisatrice ? L’annonce avait de quoi faire peur. Et pour cause, voir l’une des actrices hollywoodiennes, celle qui plus est habituée au cinéma d’action depuis Lara Croft : Tomb Raider, passer derrière la caméra avait plus l’air d’une lubie qu’un véritable essai artistique. Mais contre toute attente, au lieu de livrer un projet proche d’un blockbuster explosif ou bien d’un film de genre, la comédienne s’est lancée dans une entreprise inattendue qui a fait d’elle une cinéaste à suivre, et ce malgré quelques défauts. Penchons-nous donc sur sa première réalisation, Au pays du sang et du miel, un long-métrage qui mérite sincèrement le coup d’œil.
Loin des conventions des studios, Angelina Jolie, en tant qu’artiste engagée, a préféré s’intéresser à un fait historique loin du territoire de l’oncle Sam à savoir le siège de Sarajevo (1992-1996), connu comme étant le plus long siège de l’histoire de la guerre moderne. Et pour cela, au lieu de montrer l’horreur de la guerre via des séquences musclées dignes de n’importe quel film de ce genre (et pour ne pas dépasser un budget étonnement faible de 10 millions de dollars), Angelina Jolie a décidé de nous la dévoiler par le biais d’une « petite histoire » : une romance entre deux personnes se retrouvant dans des camps opposés. Le tout en prenant des comédiens « locaux » et en tournant son film dans leurs propres langues (Serbe et Bosniaque) Vous l’aurez compris, plutôt que de se laisser aller à la facilité la plus pure, la réalisatrice a tout simplement oser en voulant à tout prix mettre sur un pied qui lui tenait à cœur (vu ses engagements). Et rien que pour cela, nous ne pouvons que l’applaudir !
Alors oui, avec un tel budget, Joli s’est retrouvée un peu limitée dans la mise en chantier d’Au pays du sang et du miel. Notamment en ce qui concerne certaines scènes impliquant des décors plus impressionnants ou des explosions : des effets spéciaux ou bien des fonds verts mal réalisés et qui sonnent donc incroyablement faux. Sinon, la direction artistique du film tient admirablement bien la route, que ce soit l’ambiance générale de ce dernier ou encore son aspect visuel. La réalisatrice se démène pour nous livrer un long-métrage qui sache mettre en lumière les horreurs de ce conflit (les morts, le sort réservé aux femmes), que ce soit par le biais d’une mise en scène maîtrisée à certains moments (très bonne utilisation des hors-champs et des bruitages) et d’une bonne écriture, offrant des séquences pour le moins horribles à regarder mais également puissantes (sans mettre de côté une histoire d’amour captivante). Bref, tout ce qu’il faut Au pays du sang et du miel pour marquer les esprits lors de son visionnage et de ne pas laisser indifférent à ce fait historique.
S’il y avait quelque chose à reprocher à ce film, c’est le travail effectué par Angelina Jolie sur celui-ci. Car même si elle s’en sort plus qu’honorablement sur bien des points, elle ne peut éviter les défauts inhérents à toute première réalisation. Comme des répliques parfois plates ou bien une direction d’acteurs pas souvent convaincante (alors que l’ensemble de la distribution n’est pas honteux). Mais c’est surtout du côté de la mise en scène que le long-métrage pèche le plus. Car si elle sait se montrer diablement efficace lors des moments choquants et évocateurs, elle ne parvient pas à susciter l’intérêt pour ce qui est des discussions des personnages. Scolaire et plan-plan au possible, Au pays du sang et du miel se montre pour le coup assez longuet et même un peu fade durant quelques minutes. Ce qui fait tâche comparé au reste du projet et c’est bien dommage.
Qu’à cela ne tienne, Au pays du sang et du miel est une bien bonne surprise ! Et pour cause, il s’agit d’un film de guerre dramatique sachant à la fois émouvoir et ébranler, en plus de mettre en avant une réalisatrice ayant un fort potentiel. Et qui attend d’être à la tête d’autres projets pour pouvoir peaufiner son art et corriger ses carences.