Voir le film

Un lieu : de la neige, de la buée quand on parle, des forêts profondes et des roches saillantes, des petites bicoques éclairées par un feu qui ne parvient pas à lutter contre le mordant du froid, un ciel bas et lourd et des routes invisibles.


Des gens : des indigènes opaques qui font peur aux occidentaux contemporains, des flics dépassés, des locaux qui tirent d’abord et se taisent ensuite, des parents en deuil qui chuchotent, un écrivain chasseur de loups plein de bon sens et de sagesse dans ce monde de brute, mais qui garde aussi ses petites pénombres intimes qui seront à même d’éclairer d’une noire lumière cette bien ténébreuse affaire.


Une intrigue : des enfants disparus, des loups prédateurs, une femme dans son bain qui fait presque autant flipper que celle de Shining, mais sans métamorphose, des masques en bois, des paroles mystérieuses que les figurants eux-mêmes ne comprennent pas, des twists à base de cave, de bâches, de balles et de flèches, et une enquête qui se barre en Mister Freeze sur le mode « Putain, faudrait dégivrer l’intrigue, mais la flemme, ce matin je reste chez moi, après tout, Netflix, ça suppose de pas décoller de son canapé ».


Une atmosphère : lenteur et susurrations, velours douloureux du deuil sous le manteau pesant d’une neige éternelle, parenthèse enchantée et solaire d’un viol en final bolognèse sur les sables dorés de l’Irak, retour à la neige et aux vieilles qui déblatèrent, BASTOS EN RAFALES EN MODE COMMANDO CAPTAIN IGLOO, snowboots movie survival pour un chemin sans retour, insistance douteuse du chasseur/scripteur, grotte de Platon, retour à la civilisation pour un dénouement qui déplace en mode psychanalytique les enjeux (par leur enfant, donc le mien), et suspens salutaire quant à la rationalisation possible ou non de tout ce merdier. Violence, lancinance, déliquescence, fulgurance, transhumance, incontinence.


Saulnier a carte blanche (neige), et nous prend pour des simplets. On a beau saupoudrer son vide de givre, de sang et de masques, son vent obscur ne trompe aucun homme, ni Dieu.

Sergent_Pepper
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Poussif, forêt, Vu en 2018 et Netflix

Créée

le 17 déc. 2018

Critique lue 2.9K fois

22 j'aime

3 commentaires

Sergent_Pepper

Écrit par

Critique lue 2.9K fois

22
3

D'autres avis sur Aucun homme ni dieu

Aucun homme ni dieu
Sergent_Pepper
4

(onsfoudnot’) gueule d’atmosphère

Un lieu : de la neige, de la buée quand on parle, des forêts profondes et des roches saillantes, des petites bicoques éclairées par un feu qui ne parvient pas à lutter contre le mordant du froid, un...

le 17 déc. 2018

22 j'aime

3

Aucun homme ni dieu
Diego290288
7

AU COEUR DES TENEBRES

Réalisateur américain parmi les plus prometteurs du moment, Jéremy Saulnier (Blue Ruin, Green Room et 2 épisodes de la saison 3 de True Detective) a vu son dernier projet racheté par Netflix et on...

le 30 sept. 2018

22 j'aime

1

Aucun homme ni dieu
Velvetman
8

Red Snow

Avec son troisième film, Jeremy Saulnier se focalise une nouvelle fois sur le versant sombre de l’Amérique et son déchaînement de violence. Abstrait, ambitieux, et déroutant, Hold The Dark est une...

le 28 nov. 2018

19 j'aime

1

Du même critique

Lucy
Sergent_Pepper
1

Les arcanes du blockbuster, chapitre 12.

Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...

le 6 déc. 2014

774 j'aime

107

Once Upon a Time... in Hollywood
Sergent_Pepper
9

To leave and try in L.A.

Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...

le 14 août 2019

715 j'aime

55

Her
Sergent_Pepper
8

Vestiges de l’amour

La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...

le 30 mars 2014

618 j'aime

53