J'ai enfin revu ce film grandiose que je n'avais pas revisionné depuis au moins 20 ans, et sans entracte, j'ai finalement bien tenu le coup. Drame historique, chronique de la guerre de Sécession, étude de caractère d'une femme passionnée, capricieuse, volontaire et arriviste, réflexion sur le couple, portrait d'un aventurier plongé dans une Amérique tumultueuse, Autant en emporte le vent est un peu tout ça, un film multiforme, le symbole même de la production luxueuse hollywoodienne, conçue et contrôlée par les producteurs, en l'occurrence David O'Selznick qui avait acquis pour 50 000 dollars les droits du roman de Margareth Mitchell (qui était un peu plus "anti-yankee" que le film) paru en 1936. Pendant un an, il mena une sorte de combat pour monter son film et surtout lança une incroyable campagne pour trouver sa Scarlett, testant aussi bien des figurantes anonymes, des secrétaires, des vendeuses de magasins que le gratin des stars de l'époque. Choisie au dernier moment, l'Anglaise Vivien Leigh a donné à jamais un visage à ce portrait d'héritière sudiste à l'énergie farouche qui contraste avec la bonté d' Olivia de Havilland dans le rôle de la douce Mélanie. Selznick employa plusieurs réalisateurs de seconde équipe, puis George Cukor et Sam Wood avant que Victor Fleming ne termine le film et le signe seul, mais on peut dire que c'est un vrai film de producteur et qu'il clôture en beauté l'apogée du romanesque purement hollywoodien, car en 1940, Orson Welles allait changer la conception du cinéma avec Citizen Kane.
L'adaptation de cette chronique du vieux Sud qui refuse de mourir, a simplifié l'intrigue touffue du roman sans le trahir, c'est devenu un beau mélodrame, l'un des films les plus célèbres du cinéma, qui a récolté 10 Oscars (dont le premier Oscar du second rôle féminin décerné à une actrice de couleur, Hattie McDaniell la truculente Mammy), une oeuvre monumentale filmée dans un somptueux Technicolor qui met en valeur les chatoyantes toilettes et les élégants costumes gris des Confédérés, sans oublier la qualité de l'interprétation, et des séquences inoubliables aux belles images de baisers romantiques sur fond de ciel rougeôyant, la séquence de l'incendie d'Atlanta, ou le sensationnel travelling en plan-séquence qui part de la robe rouge de Scarlett, s'élève devant la gare sur des centaines de soldats blessés couchés à même le sol pour finir sur le drapeau confédéré en lambeaux qui flotte au vent... le tout constamment soutenu par la musique très guimauve de Max Steiner.
Tout ceci est très joli, mais je n'y suis pas vraiment sensible, ça ne m'a pas touché ; mon premier visionnage m'avait plutôt à demi passionné, je n'ai donc guère varié, car étant devenu plus émotif avec l'âge, je n'ai cette fois pas eu de larmes aux yeux, ça signifie que tout ce côté larmoyant qui faisait autrefois chialer s'est peut-être étiolé, je ne sais pas. C'est un succès qui reste incompréhensible pour les gens qui ont aujourd'hui 20 ou 25 ans, mais également pour un gars de ma génération, car je n'ai pas particulièrement vibré aux revers de fortune de Scarlett O'Hara et aux chamailleries constantes qu'elle entretient avec Rhett Butler pendant près de 4 h, son caractère insupportable m'a aussi agacé, et même si le rythme est assez soutenu, le film accuse quelques longueurs.
Alors ça reste sans aucun doute un film merveilleux pour une certaine catégorie de public dont je ne fais pas partie, ce côté mélodramatique ayant fini par me laisser indifférent, c'est peut-être dommage, j'en suis conscient mais c'est ainsi. Ceci dit, ça reste quand même un film à voir au moins une fois dans sa vie.

Ugly

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