Si vous avez trouvé ce film intéressant, ne prenez pas le volant
Après un excellent Ghost in the shell, oshii sort du carcan "anime" pour tourner un film qui a pourtant tout d'un anime, mis à part les acteurs.
On retrouve ici les prémices du style GITS2 : un film relativement (très ?) contemplatif, qui n'invite pas le lecteur à s'intégrer à la trame de l'histoire. Un environnement froid et impersonnel.
Cependant, là où un GITS2 avait pour lui la pluralité des décors et des coloris et un souci du détail omniprésent, Avalon joue lui sur la sobriété et la répétition. C'est un choix. Si la plupart des gens qui ont aimé ce film vous diront qu'Avalon et Matrix n'ont rien en commun, le coloris verdâtre, le teint délavé et le rythme assez lent y renvoient irrémédiablement, ainsi que le thème réalité virtuelle/réalité indiscernables. A vrai dire, Avalon aurait pu tout à fait être un spin-off de Matrix, à l'image des Animatrix.
C'est ici qu'arrive la raison qui fait aimer (vous) ou détester ce film (moi) :
Jouer sur la répétition est une bonne chose, mais c'est ici poussé à l'excès, à un point tel que je me suis surpris à rire en voyant la succession (inter)minable de rentre chez soi/métro/jeu/rentre chez soi etc. L'apothéose du pseudo-poético-abstrait est atteint avec la scène où l'héroine prépare la tambouille à son chien. 5 minutes de cuisine totale. Si le but était, comme dans GITS2 (Batou y nourrit aussi son chien), d'intégrer enfin une facette humaine à l'histoire, il y avait des moyens moins ennuyeux de le faire. Je vous avoue que lorsqu'elle se rend compte que son chien a disparu, j'ai failli être pris d'un fou rire.
Les scènes dans le monde virtuel ne sont pas assez nombreuses; quand bien même, le fait de ne pas avoir donné le background du jeu et de ne pas excéder des parties de 2-3 minutes de long procure une impression de jeu sans personnalité et sans but, donc très peu intéressant à suivre au final...
Moi, inculte ? Non, je ne rechigne en rien à regarder des films "contemplatifs" ou expérimentaux, mais la manière dont c'est tourné dans ce film suscite l'ennui. On s'attend à un revirement, un schisme tranquillité/action, mais rien ne vient. Dans certains films cela contribue au tragique ou à la détresse, ici la répétition des mêmes plans à l'excès m'a fait le même effet qu'un benny hill, passé l'ennui premier.
Ajoutons à cela le scénario inexistant, au moins autant que les dialogues, au moins autant que le jeu d'acteurs. J'ai commencé à me prendre au jeu quand il a été question de joindre les neufs soeurs, mais on retombe vite dans l'ennui. Même lorsque l'héroine accède à la "class real", le rythme anémique pourrit la confrontation entre elle et l'autre, qui a fait le choix de rester dans cet univers au détriment de son corps dans le monde réel (là encore, c'est le point de vue de Matrix vu dans l'autre sens). Le morecau d'opéra est d'ailleurs carrément insipide.
Pour moi, ce film avait du potentiel. Mais j'ai eu l'impression qu'Oshii lui-même ne savait pas exactement ou il allait quand il a fait ce film; c'est du moins l'impression qui persiste tout au long. Long est le mot : le même film en court-métrage aurait été très bon.
On sent chez le réalisateur la même volonté qu'un Flaubert écrivant Madame Bovary : faire un livre décrivant par son existence même l'ennui de la vie d'une personne. Sauf que même dans Madame Bovary, il se passe quelque chose.