Un film de Werner Herzog sur la situation des enfants handicapés dans la RFA des années 70. On s'interroge sur leur intégration difficile dans la société, auprès des autres enfants notamment, et sur la manière qu'ils ont de vivre leur isolement, le regard des autres et, globalement, la mentalité d'un pays et d'une époque loin d'être au top, semble-t-il, en matière d'insertion.
Les enfants racontent leur manière de se distraire, d'occuper les journées. On peut rêvasser : une petite de 6 ans nous parle de sa passion pour les Indiens d'Amérique. .. mais une journée c'est long, nous dit-elle, on arrive vite à court de songes.
Il y a le dessin. Et le cinéma. Une bande de trois quatre jeunes en fauteuil ont un projet de film. L'un d'eux voudrait se filmer en train de voler dans un magasin, pour montrer qu'on les regarde toujours sans vraiment les voir.
_ Pourquoi n'as-tu pas tourné ce film ? Lui demande Herzog.
_ Parce que je ne peux pas filmer et voler en même temps.
Le film présente l'handicap sous l'angle de la solitude et de la difficulté à s'insérer, les difficultés de la vie quotidienne étant à peine abordées, sinon comme tout à fait surmontables. C'est en tout cas ainsi que les gamins semblent vouloir le présenter. C'est pourtant aussi la difficulté du quotidien, notamment les limites et les exigences du corps, qui crée la difficulté à aller vers l'autre.
Lorsque l'on regarde leurs dessins c'est, en tout cas, la solitude qui prime : ils se dessinent dans des cages, et les autres comme des poissons dans l'eau.
On fait ensuite un bond de plusieurs milliers de kilomètres, et même, pourrait-il sembler, de plusieurs dizaines d'années. On retrouve un professeur d'université aux États-Unis, victime de la polio à 17 ans, pas loin d'être aussi mobile qu'un tétraplégique. Il se débrouille grave au States. L'université est toute adaptée, avec des rampes partout, et son coloc lui fait sa toilette du matin en lui parlant de ses rencards de la veille. On lui a même bricolé sa bagnole, avec une passerelle électrique, un accroche-fauteuil au sol, une radio Cibie en cas de pépin, la conduite au volant, et un starter électrique. Petit côté DeLorean. C'est la mentalité des années 2000 avec la technologie des années 70, mise à profit maximum. "Merci la compétitivité", dit le monsieur. Pour une fois on est un peu d'accord (même si se pose alors la question de l'égalité des chances...).
Retour en RFA pour la fin du reportage. Des enfants qui n'ont pas de bras jouent sur la plage, Werner Herzog s'inquiète pour leur avenir.
En France aujourd'hui, et probablement en Allemagne, du chemin a été fait. Il y a toujours du boulot, cela dit, pour le handicap de l'enfance, et aussi pour la transition vers l'âge adulte, en matière de suivi et d'égalité des chances. Pour ce qui s'agit du regard des autres, il sera toujours dur de vaincre la peur ou la gêne face au handicap. Le cinéma aide un peu, parfois. Pas toujours. Mais je suis pas là pour balancer.