C’est dans un environnement à l’actualité déjà très anxiogène, dans un climat social très tendu, que BAC Nord est arrivé dans nos salles. Réalisation de Cédric Jimenez, déjà à la tête du très bon La French (2014), qui narrait des faits d’actualité remontant à la période de la French Connection, BAC Nord nous rapproche de notre époque pour une immersion dans un univers où le danger règne en permanence.
Comme l’indique le titre du film, nous suivons ici le quotidien de trois policiers de la BAC Nord, travaillant dans les quartiers Nord de Marseille, souvent réputés pour leur instabilité. Le film nous met rapidement en situation, nous faisant rencontrer les trois personnages principaux avant de les mettre en action dans ces mêmes quartiers où ils cherchent à coincer des dealers à la tête des trafics de drogues qui constituent le principal fléau de ces quartiers. Les trois hommes sont montrés comme des hommes de terrain et d’action, passant de nombreuses heures à scruter les délinquants, travaillant régulièrement avec des indics et employant souvent la manière forte pour parvenir à mener à bien leurs missions.
BAC Nord choisit la carte de l’immersion, montrant les policiers de la BAC Nord dans leur quotidien, que ce soit dans leur vie personnelle mais aussi sur le terrain, avec des affrontements réguliers avec une population hostile, où n’existe aucun dialogue, juste la violence. Au niveau de l’immersion, BAC Nord réussit à relever le défi, notamment grâce à des scènes d’action bien réalisées, lisibles et assez captivantes, alimentant une tension croissante favorisant l’implication du spectateur, l’enfermant dans un étau qui se resserre aussi sur les personnages. La seconde partie, assez rapidement amenée et sans grande transition, s’intéressera aux démêlés d’ordre judiciaire qui vont confronter les trois policiers à leur hiérarchie, avec moins de succès.
Plus expédiée, ne bénéficiant pas d’une mise en place suffisamment développée, cette seconde partie se veut plus dramatique, confrontant les policiers à l’injustice d’un système qui défendra toujours ses propres intérêts et son image, laissant les plus modestes payer pour ses errances. C’est aussi cette seconde partie qui vaut à BAC Nord de nombreux reproches qui lui sont faits, sur son aspect partisan et manquant de nuances. Aborder un tel sujet est en effet délicat, les problématiques qui y sont liées étant très profondes, nécessitant de prendre un recul souvent difficile à avoir, notamment à travers le traitement qu’en font souvent les actualités. Si le film essaie justement de nuancer par moments son propos, essayant de montrer que les policiers sont victimes d’un système qui les écrase, comme les délinquants qu’ils affrontent dans les quartiers, ce point ne ressort pas forcément de manière très évidente. En montrant la population des quartiers comme une immense masse mobilisée par la rage et la haine, hormis quelques exceptions (comme l’adolescent qu’ils embarquent en voiture, ou la mère de famille et son fils chez lequel l’un des policiers se réfugie lors d’une opération), le film la déshumanise, ce qui entérine donc la prise de parti de BAC Nord et lui empêche de véritablement toucher les problématiques de fond qui le concernent.
Choisir ce point de vue n’est, bien sûr, pas une mauvaise chose, si celui-ci permet de poser les bonnes questions et d’éveiller le spectateur. C’est quelque chose que réussissait mieux un film comme Les Misérables (2019), par exemple, nous immergeant également dans le quotidien d’une unité évoluant en région parisienne, mais qui parvenait à multiplier les points de vue pour illustrer un désordre et un chaos généralisés, broyant toute la population, la confrontant à une tension permanente empêchant toute possibilité de communiquer. BAC Nord essaie d’être choc, mais souffre de ce manque de nuances et ne parvient pas à créer cette dramaturgie qui impliquerait émotionnellement le spectateur. Les acteurs sont tout à fait convaincants, les scènes d’action réussies, laissant donc une impression mitigée face à un film qui semble avoir de bonnes idées, sans toujours aller au bout.
Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art