Et il suffit d'une version restaurée et d'une phrase du grand Tarantino, « I love Bad Boy Bubby », pour que ce film retrouve une seconde jeunesse.
Bad Boy Bubby sorti en 1993 étant écrit, produit et réalisé, ce qui est assez rare pour le souligner, par Rolf de Heer est une comédie dramatique tournant autour du personnage de Bubby, adulte de 35 ans séquestré par sa mère depuis sa naissance. Ignorant tout du monde extérieur qu'il croit empoissonné et n'ayant eu que pour seule éducation les enseignements de sa mère mégère qui le bat et qui se sert de lui pour assouvir ses désirs sexuels, il se voit catapulter dans le monde extérieur par la suite d'événements lié au retour de son père qui avait abandonné le foyer il y a longtemps.
Et que diriez-vous si, pour le début de cette critique, nous parlions des vingts premières minutes du film ? Introduction en huit-clos à l'ambiance anxiogène et complètement dérangeante, on ne sait même pas dans quelle époque se déroule le film. Nos repères sont complétement chamboulés par le nombre d'éléments malsains auquel le réalisateur nous expose et une plénitude de questions nous taraude l'esprit à ce stade du film comme les choix culinaires très douteux de la mère de Bubby par exemple. Le début du film peut cependant révéler ce qui pourra être apprécié comme un défaut chez certains spectateurs durant toute l’œuvre qui est son aspect très dérangeant. En effet, le film n'est régi par aucune loi morale ni divine, on comprend d'ailleurs très vitre l'influence athée que le réalisateur à voulu insuffler à son œuvre. Mais malgré cette ambiance, qui pourra repousser certains spectateurs, se cache une histoire folle et humaine.
On passe ensuite du huit clos à une quête initiatique de Bubby pour découvrir le monde extérieur. Attardé et ayant pour seul moyen de communication les quelques phrases qu'il a eu l'occasion d'entendre, nous suivons donc cet homme avec un corps d'adulte mais un esprit d'enfant dans son apprentissage de la réalité. Apprentissage d'autant plus prenant par le très bon jeu d'acteur du jusque là encore méconnu Nicolas Hope sur qui l'on a placé un microphone binaural de chaque côté de la tête durant le tournage pour que le spectateur entende les mêmes bruits que Bubby et ainsi se mettre plus facilement dans la peau du personnage.
L'allégorie de la caverne de Platon est une allégorie exposée par Platon, philosophe Grec maudit par les Bacheliers, qui expose de façon imagés l'apprentissage de l'Homme de la connaissance de la réalité et les difficultés de la transmission de celle-ci. La raison de cette digression philosophique dans une critique cinéma n'est pas anodine, elle est tout simplement dû au fait que je trouve que le film est la parfaite représentation cinématographique de cette allégorie. Bien sûr, d'autres œuvres traitent ce sujet comme l’excellentissime Truman Show ou encore Matrix pour ne citer qu'eux, mais ils ne traitent le sujet que dans son aspect global à contrario de Bad Boy Bubby qui le traite dans son ensemble en partant de la dissimulation de la réalité par un apprentissage faussé, celui de sa mère, jusque dans la dure accession de Bubby à la connaissance du monde extérieur à sa sortie de la caverne qui se révèle être ici le foyer familiale.
Saupoudrer le tout du complexe d’œdipe du protagoniste de l'histoire, d'une pincée de Rock'n Roll, d'une dose de chaos, adoucissez le tout de chatons et recouvrer le mélange avec du cellophane et vous aurez ainsi l’œuvre final.
C'est donc après plus de 10 ans d'écriture que Rolf de Heer décide enfin de réaliser le film qui sera considéré comme beaucoup comme le plus abouti de sa filmographie mais aussi comme un OVNI cinématographique de par sa fulgurance qui vous marquera la rétine à vif. Au final je ne saurai que trop vous conseiller de sortir de votre caverne vous aussi à l'instar de Bubby et d'oser Bad Boy Bubby.