Hockney sur glace
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"Basic Instinct" place son histoire sur deux tableaux qui se complètent, celui du thriller, et celui de l’érotisme. Il est la référence du genre du thriller érotique, et indéniablement, c’est d’une maîtrise absolue concernant le fait de brillamment mêler les genres pour créer ce genre à part entière.
Le chef d’œuvre de Verhoeven est un thriller glaçant, tortueux et violent, qui décuple ces différents aspects en jouant constamment sur le terrain de l’ambiguïté scénaristique. Le film déjoue alors nos attentes et surprend. Il amène le spectateur là où on ne l’attend pas et sans cesse redynamise l’intrigue pour qu’elle ne s’essouffle jamais. C’est un film qui joue sur des pics de tension qui viennent rebattre les cartes sans faire aucun faux pas. L’intrigue est finement construite, est déroulée avec habileté et d’une extrême solidité pour mener un jeu intelligent du début à la fin, finissant même par un vrai tour de force qui laisse une tension extrême à l’arrivée du générique.
Ni plus, ni moins, qu’une enquête policière sur un meurtre, le film de Paul Verhoeven s’affranchit de ce statut tout de même réducteur. Il en possède les codes qui sont extrêmement bien établis au sein de l’intrigue, il en est impactant par la force scénaristique de cette enquête passionnante et s’éloigne, à ce niveau, de toute simplicité liée au genre, en étant d’une grande intelligence dans le fait de mêler la violence de l’érotisme qu’il instaure comme pilier de ce film.
Effectivement, cette enquête n’est pas aussi forte et éclatante sans le genre érotique en son centre. Il se démarque des autres films d’enquête grâce à cela, ce qui le rend unique. Qui dit érotisme, dit aussi les séquences de tension sexuelle très forte. Le film en est chargé, pourtant il n’en fait jamais trop, il ne tombe jamais dans l’excès. Le juste milieu est trouvé car ces scènes s’inscrivent dans l’histoire du film et sont liées avec ce qui est fait de l’intrigue ou des personnages. Qui dit également érotisme, dit aussi insolence et audace, presque les maîtres mots de l’œuvre de Verhoeven qui laisse aller son écriture, sans se fixer de limite. L’excès n’est jamais loin, le réalisateur compose avec rigueur son intrigue. C’est à ce niveau que l’on voit la puissance du scénario, mais aussi la perversité de la vision, surtout du propos.
"Basic Instinct" c’est aussi deux personnages, Nick et Catherine, Michael Douglas et Sharon Stone. Deux compositions, deux personnalités qui finalement se complètent. L’évolution de l’intrigue accorde une place centrale à la relation qui évolue entre les deux protagonistes, la dualité qu’il y a entre eux et l’ambiguïté de leur relation. Avant tout psychologique, l’intrigue explore les tréfonds de l’esprit humain en créant un jeu de contrôle entre les deux protagonistes. C’est extrêmement pervers et malsain mais brillamment fait.
La nervosité du personnage de Nick qui s’accorde aux vices plutôt que de les affronter, représente un policier comme on a peu l’habitude de voir, cela permet encore une fois de creuser l’écart entre ce film et un simple film policier.
Mais si le charisme de Michael Douglas et son jeu lui permettent de décrocher un de ses meilleurs rôles, tous les regards sont portés vers Sharon Stone dans la peau d’une femme séduisante, mystérieuse et provocatrice. Assez incroyable dans son rôle, l’actrice crée un magnétisme fou grâce à ce qu’elle est, un personnage féminin fort et fascinant.
Ce couple de cinéma est l’un des plus marquants, par le jeu de dominant/dominé entre eux, un jeu qui brouille les pistes sur le réalité de leur relation, mais aussi par la dangerosité du contrôle de l’un sur l’autre, appuyés par les armes employés entre sexe, manipulation et meurtre.
A noter, en plus d’un scénario redoutable, que le film possède une réalisation réfléchie et marquée d’une certaine précision pour ne devenir que plus percutante à son tour. Paul Verhoeven développe une tension avec sa caméra, accentuant certains détails ou en l’utilisant comme un élément qui sert l’arc narratif. La réalisation filme également les scènes sexuelles, qui au-delà de servir l’intrigue et ne sont aucunement des scènes de voyeurismes, comme des moments de pure tension.
L’ensemble visuel développe une atmosphère autant ambiguë qu’envoutante, secondée par la photographie et les teintes bleutées et grisâtres qui brise la perception de la réalité, un sentiment encore plus présent avec l’aide d’une bande son remarquable, signée Jerry Goldsmith.
Avec ce thriller érotique, Paul Verhoeven signe la référence du genre, en plus d’un très grand film qui frappe très fort. Un jeu de domination sulfureux, qui tombe dans la violence, secondé d’un érotisme qui amène jusqu’à la manipulation, autant des personnages, que des spectateurs.
9/10
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Créée
le 17 mai 2021
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