L’avantage d’un film de quarante-huit secondes c’est qu’on peut aisément le regarder plusieurs fois « en une fois ». Si j’ai bien en tête certains films / plans des Lumière, oublié d’autres que j’ai pu glanés ici ou là, celui-ci j’en suis certain je ne l’avais jamais vu. Je l’ai donc regardé plusieurs fois pour en apprécier les subtilités que cet unique plan regorge.
Pour être honnête je l’ai vu après être tombé dessus sur Fb (via un post Sens Critique je crois) dans sa version colorisée, remasterisée en 2020. Alors en couleur c’est beau, impressionnant, émouvant bien sûr mais ça enlève quelque chose. Du réel, peut-être. On sent que c’est trafiqué, que c’est pas l’original, qu’une partie de ce qu’on voit (la couleur) ne date pas de 1896.
Sans doute aussi parce que les Lumière, en règle générale, c’est aussi ce besoin de capter le réel au moyen d’une savante fabrication, car le mystère demeure : quelles sont les parts de mise en scène et d’improvisation là-dedans ?
Dans une rue de Lyon, une vingtaine de personnes en redingotes se livrent à une bataille de boules de neige. Un homme sur un vélo approche et se retrouve pris pour cible dans la bataille. Il tombe, renfourche sa bicyclette et repart d’où il est arrivé. La bataille reprend.
C’est extraordinaire, Bataille de boules de neige. Le cinéma à l’état pur : durée, mouvement, perspective, une captation in media res, un dialogue avec le hors champ, la préciosité du terrain de jeu, les adultes comme des enfants. Et le cinéma naquit, et nous apparaît ici comme tout droit sorti d’un songe.