Face à un film du calibre de Batman v Superman : L'Aube de la Justice, il y a forcément énormément d'attentes. Et si une grande partie est récompensée, on ne peut sortir de la séance sans quelques déconvenues. En tout cas, le style de Snyder est certainement le plus propice à une adaptation de comics. Il retrouve d'ailleurs, ici, son directeur photo Larry Fong et renoue ainsi avec la palette visuelle colorée qui habille chacune de ses scènes de façon à en faire de véritables planches de comics animées. Toujours enclin à proposer une esthétique visuelle léchée, Snyder dirige un film techniquement très abouti, et bien souvent tourné en nocturne pour exploiter au mieux ses filtres artistiques.


Par ailleurs, cela appuie le ton sérieux et sombre du long-métrage. Que ce soit dans les thèmes (la menace du surhomme, le héros criminel,...) et, évidemment, le visuel, on ne peut s'empêcher de penser à Watchmen, film assurément visionnaire, sorti quelques années trop tôt pour le grand public. Batman v Superman confirme également l'orientation plus mature du DCEU, en comparaison du MCU. Les personnages sont emblématiques, et l'on ressent la gravité et l'ampleur de leurs actions. L'envergure de l’œuvre, en faisant se rencontrer ces symboles, dépasse vraiment tout ce que l'on a pu voir jusqu'alors dans un film du genre. Il y a également très peu de moments qui prêtent à rire ; ce n'est pas pour autant que le spectateur ne s'amuse pas.


Effectivement, difficile de ne pas remarquer l'énorme travail de recherche de Terrio pour imbriquer les mythologies des différents personnages en un ensemble cohérent. Du coup, les 2h30 regorgent de références à l'univers DC, des plus évidentes aux plus subtiles, voire aux plus pointuneues. Ainsi, c'est avant tout un film destiné aux fans, et réalisé par un fan qui s'en donne à cœur joie pour orchestrer des séquences d'action phénoménales. Entre l'affrontement épique des deux héros titre, l'infiltration du Chevalier Noir dans l'entrepôt, ou le climax avec Doomsday, pour ne citer que les plus majeures, c'est du comic visuel à l'état pur. Et si les effets spéciaux sont mesurés une bonne partie du film, c'est un déluge qui s'abat sur la fin, comme dans Man Of Steel. Le spectacle n'en demeure pas moins épique, avec cette menace conséquente qui requiert plus d'un super-héros, et devrait assurément donner un sourire coupable à tous les fans. Pour ce qui est de la 3D, elle est efficace sur les plans stylisés, lors du face-à-face notamment, et les ralentis typiques de Snyder, mais pas plus intéressante que cela à côté.


Si le spectacle est si percutant, c'est aussi grâce aux compositions de Zimmer et Junkie XL, une collaboration fructueuse et tonitruante qui profite d'un mix sonore exceptionnel pour rendre le film plus épique. Le thème désaccordé de Lex Luthor rappelle le travail de Zimmer sur Sherlock Holmes, tandis que celui plus Rock, à la guitare, de Wonder Woman, tend plutôt vers les influences de Junkie XL sur Mad Max. On retrouve l'habituel thème crescendo de Superman, un peu en retrait, et celui du Chevalier Noir a des réminiscences d'Elfman en une version plus primitive. Des thèmes différents, mais complémentaires, tous orchestrés sur ces schémas percussifs dantesques. La BO manque quelque peu d'originalité cela dit et se contente surtout de son côté emphatique.


On va essayer de rester succinct sur les nombreux personnages qui jalonnent le long-métrage. Ben Affleck manque de quelques scènes pour vraiment convaincre en Bruce Wayne. Par contre, le Batman qu'il met en scène avec Snyder est phénoménal. Inspirée par la BD de Miller, c'est une figure trapue mais terriblement agile dans l'action, dont le style de combat rappelle les jeux Arkham. Ce Chevalier Noir est sauvage, et se considère d'ailleurs comme un criminel, laissant derrière lui cadavres et os brisés. À ses côtés, Jeremy Irons offre un coup de jeune à Alfred, le transformant en majordome sarcastique, participant aux escapades du maître de maison, et faisant surtout penser à John Constantine. Henry Cavill est toujours Superman, avec un charisme absolu et des expressions de colère effrayantes. Sa présence aurait gagné à être un peu plus avancée dans le film. Amy Adams, en Loïs Lane, est moins agaçante que dans Man Of Steel, mais ses actions restent irréfléchies. Gal Gadot charme immédiatement en Diana Prince, et subjugue en Wonder Woman ; une entrée en scène spectaculaire et pleine de vitalité. Enfin, Jesse Eisenberg manipule tout ce beau monde, sous les traits d'un Lex Luthor excentrique et mégalo, dont les sautes d'humeur psychotiques le font davantage pencher vers le Joker, jusqu'à ce qu'il ait le crâne rasé. Il est à noter qu'on a de vraies prestations d'acteur qui renforcent ce ton mature et très cinématique.


L'histoire de Batman v Superman est donc chargée, mais bien menée en suivant ses thèmes directeurs. Le film sert aussi bien de suite, que de récit "origine", tout en cherchant à poser les bases pour l'avenir du DCEU (soit la Justice League), et ne se privant également pas de fan service. Il y a donc une impression bourrative par endroit, ainsi que quelques facilités. Il y a également cette volonté de proposer un spectacle toujours plus énorme - à travers Doomsday - alors que sa présence immédiate n'était pas forcément nécessaire et aurait permis de concentrer davantage l'histoire sur le clivage Batman/Superman, en partie manigancé par Luthor. Du coup, avec tous ces éléments, le film semble ne pas avoir de points d'appuis, et le montage passe constamment d'une scène à l'autre, naviguant entre les thématiques et les personnages. Il en résulte un sentiment décousu, brouillon, qui fait que l'ont peine à apprécier la portée de certaines scènes, et à s'impliquer émotionnellement.


Si la confrontation des deux icônes que sont Batman et Superman est historique, le film ne marque pas pour autant l'histoire du cinéma. Divisant énormément, à juste raison, il reste pourtant un des meilleurs films du genre. Certes, il accumule les maladresses à vouloir trop en dire, mais propose un récit original et intéressant, tout en pouvant se targuer d'être une vraie œuvre cinématographique, avec une identité. Par ailleurs, tous ses éléments sous-jacents impressionnent déjà par l'envergure promise de l'univers du DCEU et ne donnent qu'une envie : l'explorer davantage, et voir la Justice League au complet sur grand écran.

AntoineRA
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le 29 mars 2016

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Kelemvor
4

Que quelqu'un égorge David S. Goyer svp, pour le bien-être des futures adaptations DC Comics !

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