Zack, Zack, Zack...
Je suis ennuyé parce que je ne sais pas par où commencer.
Mais quand, en sortie de séance, on réfléchit à faire des jeux de mots débiles afin de se démarquer sur Sens Critique, à coups de "This is Martha !!!" ou de "Alors on lance", c'est très rarement bon signe.
Tout ça, c'est parce que j'ai fait confiance, encore une fois. Iron Man 3 ne m'aura donc pas servi de leçon, ni ma lettre pour engueuler gentiment Shane Black. Parce que je m'imaginais que Batman v Superman, cela ne pouvait être que bien. Parce que j'ai adoré tous tes autres films. Je l'attendais, ton combat des chefs. Fébrilement. Même que pendant les quelques secondes où les lumières de la salle baissaient, je sentais l'excitation monter, tout comme l'assurance d'assister à une véritable quintessence du film de super héros.
Je voulais tant y croire, à ta réussite. Ca a été le cas pendant les premières minutes. Même si un je ne sais quoi, dans ces décombres, dans l'attitude de Bruce Wayne, m'a gêné. Et puis, le film a tout à coup semblé traîner des pieds, inexplicablement. Sous le poids de son atmosphère, sans doute. L'aspect sombre de l'univers DC, c'est bien, OK. Je te dirais même que j'en suis client. Mais il y a un fossé entre l'exploration des ténèbres et adopter une posture forcée. Parce que le grave et le sérieux, dans Batman v Superman, tu le voudrais paré d'accents presque wagneriens, alors que tu l'assènes finalement à coups de marches funèbres surlignées et écrites par un goth qui a raté sa dernière TS. Et en filmant Batman en train de tirer une tronche de tous les instants à longueur de film.
Cela ne serait pas encore bien grave si le film respectait un tant soit peu la matière qu'il adapte. Oui, tu as bien lu le Dark Knight de Miller, au point d'en reprendre plusieurs aspects et plusieurs scènes clé, parfois en les retournant, comme pour dire que maintenant, du digères et assimiles tes références. Mais Zack, que s'est-il passé avec ton scénar' ? La partie "civile" traînasse, même si elle n'est pas inintéressante. Elle permet d'introduire Selina Kyle... Euh, Mademoiselle Prince... Pis c'est de ta faute, ça, si je confonds. Car le personnage ressemble comme une soeur à la Catwoman de Nolan dont-il-ne-faut-pas-dire-son-nom-de-super-héros. Parce que rester mystérieux, c'est cool, tu vois. Et puis, l'intrigue, elle est farcie de rêves surréalistes sans rimes ni raison, elle déborde de sub plots dispensables et aborde des thématiques super intéressantes qui, malheureusement, sont tout juste évoquées, sans autres formes de procès. Sauf quand cela tourne autour de la religion et que cela fera hurler tes détracteurs. Tu oses même leur mettre sous le nez, cette fois-ci, un quasi décalque de la descente de la croix. Je te soupçonne d'y prendre plaisir, tiens, à les énerver, ceux là. Coquin.
Mais le plus grave, c'est pas encore ça. Parce qu'heureusement qu'il y avait Batman et Superman d'écrit sur l'affiche, car franchement, on n'en jurerait pas, dans ton film. Parce que Batman, t'en as fait un Punisher du pauvre, à mille lieux de celui de Miller, qui n'hésite pas à marquer au fer rouge les criminels qu'il arrête, comme un baiser de Judas qui les condamne, apprenons-nous, à crever ipso facto en taule. Il n'hésite pas non plus à tuer et à utiliser des armes à feu. Et c'est finalement un vieil aigri qui se bastonne comme un enfant de cinq ans pour rester le roi du bac à sable. C'est dur à encaisser, Zack, ce que tu as fait du caped crusader.
Si au moins c'était pour une bonne raison et un adversaire à la hauteur... Non, ton Superman, c'est devenu un dépressif qui doute de sa nature. Certainement parce qu'il a oublié de passer chez son toubib pour renouveler son traitement. Ou parce que tu veux dire qu'il réagit de la manière la plus humaine alors qu'il est un extra-terrestre. Il se révèle pourtant à l'occasion aussi belliqueux que Batman et va jusqu'à user de la menace, comportement étrange de sa part. Lex Luthor, lui, devient entre les mains de tes scénaristes une pâle imitation d'un Joker Gilles de la Turette pris d'une logorrhée verbale qui pourra vite se révéler énervante. Quant à Doomsday... J'ai failli hurler. Et je dois te dire que si tu avais été à côté de moi dans la salle, tu te serais mangé une bonne paire de baffes dont tu te serais souvenue toute ta vie, Zack. Merde ! C'était quoi ces origines ? C'était quoi ce troll des cavernes de La Communauté de l'Anneau qui se prend pour Hulk ?
Enfin bon, la paire de baffes, c'est un des potes qui était venu avec moi qui se l'est prise. J'ai pas de scrupules à te le dire parce qu'il aime bien que je soulage toute ma frustration sur lui. Mais bon, la deuxième version, comme dans DBZ, comme elle renouait avec la version papier, je me suis calmé. Un peu.
Bon oui, l'action est quand même au rendez-vous. Mais c'était la moindre des choses, non ? Et puis, tu attends avant de lâcher les chevaux, faut dire aussi. Mais bon, une fois entamée, elle ne s'arrête plus. Spectaculaire, filmée au coeur de l'action, en one on one ou façon Royal Rumble, elle colle le spectateur à son siège, même si quelques transitions de stages font immédiatement penser à une baston tirée d'Injustice.
Je sais pas quoi te dire Zack, tellement je suis déçu. j'essayerai de revoir ce que tu as pondu ce week end, histoire de porter un autre regard sur ton Batman v Superman une fois la pression redescendue. Mais merde, je me demande encore comment tu as pu bouffer la feuille de match et dénaturer à ce point de telles icônes de la pop culture. Parce que là, à chaud, il n'y a qu'un truc qui me vient à l'esprit : Grosse déception...
La seconde séance ne parvient pas forcément à l'effacer, cette déception. Déjà, parce que je me rends compte que deudé ou troidé, c'est le même combat. Si les lunettes sur le nez, ça fait toujours style, rien ne justifie, dans ton spectacle, qu'on débourse quelques euros supplémentaires. A part peut être la scène de la jeunesse de Bruce où il tombe dans le trou avant que les chauves souris ne l'en sortent dans un tourbillon ?
Et surtout, si on comprend (pas valider, hein, ne me fais pas dire ce que je ne dis pas, Zack) pourquoi la Warner a pris cette direction dans la construction de son univers cinématographique, une deuxième vision permettra de se rendre compte que le scénario qu'on t'a mis dans les mains, il souffre d'ellipses malvenues, d'incohérences et d'intervention artificielles, comme celle de Wonder Woman, en permanence déconnectée du récit principal. Elle ne sera que prétexte à un thème musical furieux et mémorable pendant la bataille finale. Ta belle photo souvent monochrome se détache aussi, ainsi que l'ami Batman qui pète quand même sacrément la classe dans son armure.
Mais cela ne me fera pas changer d'avis pour autant, Zack, car comme tu le fais dire à Cape Rouge, de manière grave : "on ne peut rester bon dans ce monde". Même toi, Zack.
Une forme d'aveu ?
Behind_the_Mask, qui se pend avec sa cape.