L'anthropomorphisme, pour le meilleur et pour le pire. Des animaux qui parlent dans des films, c'est là monnaie courante. Mais à quelle fin? Bien souvent, ce ne sont que des extrapolations sentimentales, frôlant la miévrerie, et ne s'avérant être qu'une couche de plus visant à l'identification du spectateur, coûte que coûte. Ici, Baxter, bull terrier au poil mal dégrossi, nous exprime noir sur blanc son profond mal-être.
Une vieille femme, puis un couple et enfin un enfant vont tour à tour le recueillir. Il fera à chaque fois tout ce qui est en son pouvoir pour s'intégrer au sein de ces nouveaux cercles, mais ses efforts sont pour ainsi dire "sysiphiens". Les hommes, leurs petits tracas et leur routine harassante. Un père de famille adultère, des sourires de façades... Un pavé dans la grande mare.
Ce qui interpelle de prime abord, c'est bien sur les dialogues de Jacques Audiard ( qui pour le coup n'a rien à envier à son père dans ce domaine-ci !), qui résonnent quelque part, on ne sait vraiment où. Un chien peut-il ressentir les mêmes angoisses qu'un homme? On le savait son "meilleur ami", mais toute de même ! Le pire, c'est que ça fait mouche ! Lorsque le Bax nous évoque son envie de s'enfiler la voisine de sa proprio à même le sol de son jardin, on ne sait plus si on doit être choqué ou rire jaune. Ces monologues à fleur de peau où se mêlent cynisme et lucidité m'ont rappelé à ce titre ceux de Phillipe Nahon dans "Seul contre tous" de Gaspar Noé.
La réalisation de Jérôme Boivin est évasive et un poil brute, ce qui rend plutôt bien, puisqu'en se laissant le temps d'instaurer une atmosphère, celui-ci peut ensuite dérouler de façon cohérente à sa guise le fil des pensées sombres de son anti-héros canin.
Quelques personnages secondaires auraient gagnés à être développés davantage, mais leur présence contribue à rendre le cadre de l'histoire encore plus flou, loin de tout contexte, renforçant par la même le sentiment d'incompréhension de Baxter.
Anyways...
Cela m'a fait plaisir de constater que le cinéma français pouvait s'éloigner des stéréotypes en terme de film basé sur la relation entre l'homme et l'animal, notamment des aventures à la "Belle et Sébastien".
Radical, plus dans le fond que dans la forme, "Baxter" est un joli pied de nez aux productions actuelles, qui ont un mal de chien à finalement laisser la parole aux êtres peuplant cette terre.
Tout le monde n'a pas encore baissé son froc, on peut encore mordre les pattes de qui on veut, et ça tombe bien, parce qu'en terme de critiques, J'AI LES CROCS !!!