Baxter est fondé sur un principe extrêmement original, puisqu’il met en scène, avec le courage ultime du premier degré absolu, un chien dont la bande-son transmet l’intégralité du monologue intérieur. Le bull-terrier Baxter, avec son allure ingrate mais pittoresque, permet un regard totalement étranger sur la banalité : il n’y a rien de plus exotique, fascinant, rien qui remette mieux en question le sens profond des attitudes, des pratiques ; rien de plus révélateur aussi.
Déversant ses considérations existentielles et réactions immédiates, ce chien terre-à-terre est ballotté de maîtres en maîtres, d’abord avec une femme d’âge mûre, puis un jeune couple et enfin, un enfant bien sinistre, archétype vivant de l’ingénieur psychopathe (productif, visionnaire, dominateur et dérangé). C’est pourtant de lui que Baxter se sent le plus proche. Le film opère un glissement de fond du chien observant de très loin le monde vers ce petit garçon étranger à la morale humaine, tous deux « sans peur ni amour », observateurs orientés vers l’action et la satisfaction.
Magique et trivial, l’ensemble s’inscrit dans un registre de thriller réaliste, émaillé d’échappées fantastiques. Jérôme Boivin a réalisé un film particulièrement audacieux et surprenant. Au-delà du principe, c’est toute son ampleur psychologique qui capture intensément l’attention du spectateur. Baxter parle bien sûr de la condition du troisième âge ; des jeunes amoureux confrontés à la fin de la jeunesse et à la parentalité. Il le fait avec brio et intuition.
Il a également des allures de conte grave, avec des épreuves et des héros manichéens, ou plutôt aux fonctions manichéennes qu’ils ignorent, faibles récipients qu’ils sont. Pour mettre ce monde en marche, Boivin s’affranchit des impératifs conventionnels (c’est un reportage cruellement adulte, un peu à la Angst, où l’humanité se repent d’elle-même) et trahit les heureux repères, comme celui amalgamant l’enfance et l’innocence. Le seul recul moral qui soit inclus dans cette démonstration est une incitation mélancolique à assumer ses instincts.
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Suggestions :
http://www.senscritique.com/film/Barracuda/critique/25766924