Reflet de la très vieille France et de la partie la plus verrouillée de son cinéma, une sensation renforcée par le jeu des comparaisons : en songeant au fait que "Belle Étoile" est sorti en 1938, la même année que "Le Schpountz" de Pagnol, "Le Quai des brumes" de Carné, "La Bête humaine" de Renoir, "L'Étrange Monsieur Victor" de Grémillon, il devient encore plus difficile de défendre le film de Jacques de Baroncelli.
Tout n'est pas à jeter, car l'esprit naïf et sincère qui réunit les deux personnages masculins (Michel Simon et Jean-Pierre Aumont) dans un premier temps, le premier clochard et le second au bord du suicide dans la Seine, puis à une troisième interprétée par l'actrice anglaise francophone Meg Lemonnier, elle aussi candidate au suicide dans le même fleuve, distille à de rares occasions un charme suranné. L'équipe de bras cassés ainsi constituée erre de manière chaotique dans les rues de Paris avec les chagrins de chacun, financiers, amoureux ou existentiels, qui forment un carburant à un nouvel élan commun. Tout cela est bien cadenassé par un scénario simpliste qui navigue entre différents clichés, et trouve pour point de rupture en matière de bouffonnerie en excès la séquence du procès final, grand moment de grand n'importe quoi à tous les niveaux — écriture des dialogues, comportement des personnages, cohérence du tribunal.
Certains personnages sont beaucoup plus crispants que d'autres, à l'image du père (Saturnin Fabre), caricature de patriarche autoritaire, banquier intransigeant qui a trouvé un homme respectable pour sa fille et qui compte bien la contraindre au mariage. L'amitié qui est censée se développer au sein du trio bigarré peine à maintenir un intérêt minimal, prisonnière d'un récit plat et convenu. Dans le genre, "Boudu sauvé des eaux" avec le même Simon est bien meilleur.