Dans les années 90, quand on était fan de cinéma asiatique, qu’on avait fait le tour de ce que HK Video avait sorti et qu’on avait vu et revu les Jackie Chan sortis en VHS et nos enregistrements des John Woo passés sur Canal+, ça devenait compliqué de pallier au manque alors qu’Internet (et donc la possibilité d’acheter en import) n’en était qu’à ses balbutiements chez nous. Alors on tentait les films américains des réalisateurs HK qui avaient migré aux States par peur de la rétrocession de Hong Kong à la Chine qui approchait. Mais là, il fallait trier. Car que ce soit Ringo Lam, John Woo, ou encore Tsui Hark, ils ont tous eu droit à leur passage par la case Jean-Claude Van Damme. On ne parlera pas de Ronny Yu et de son triste Magic Warriors en 1997 et de son moyen La Fiancée de Chucky l’année suivante. Heureusement, certaines bobines sont sorties du lot, comme par exemple le bon Volte-Face de John Woo et le très fun The Big Hit de Kirk Wong qui nous intéresse ici.
1997, c’est donc la rétrocession de Hong Kong à la Chine, les réalisateurs les plus connus et influents de Hong Kong ont peur de ne plus pouvoir tourner convenablement dans leur pays d’origine et décident de s’exiler aux États-Unis. Kirk Wong, après avoir réalisé en 1994 les deux très bons Rock n’Roll Cop et OCTB imite ses petits copains et va se retrouver aux States, comme eux, à devoir honorer des films de commande afin de se faire un nom là-bas. On lui confie un projet avec Mark Wahlberg, la nouvelle étoile montante de Hollywood qui sort tout juste du Boogie Nights de Paul Wes Anderson, ainsi qu’une tripotée de têtes connues du grand public. Citons Lou Diamond Phillips (La Bamba, Young Guns), Christina Applegate (la série à succès Mariés, Deux Enfants) ou encore Elliott Gould (le phénomène mondial Friends). Et comme entre compatriotes, on aime bien se filer un coup de main, John Woo est un des producteurs du film. Kick Wong se donne pour mot d’ordre de faire un film décomplexé, contrairement au reste de sa filmographie hongkongaise très sérieuse, et se lance dans l’histoire de Mel, petit escroc qui avec ses potes vit de coups fourrés divers et variés lui rapportant pas mal d’argent. Trop gentil, un peu naïf, incapable de choisir entre sa copine et sa maitresse, Mel va commencer à avoir des ennuis lorsque, à la suite d’un kidnapping somme toute assez classique, son comparse de toujours Cisco va le trahir pour sauver sa peau. Mel va se retrouver en prise avec une armée de tueurs psychopathes tout en devant gérer l’arrivée de sa belle-famille ainsi que les délires financiers de sa maitresse. Un bien beau bordel l’attend dans un film qui va aller à cent à l’heure, ne laissant que peu de temps morts au spectateur qui a envie de se marrer devant un spectacle bien con, totalement assumé, et surtout très fun.
The Big Hit va mélanger action et comédie et l’équilibre est très juste. Les acteurs semblent s’amuser comme des petits fous et ça se ressent à l’écran. Les situations comiques vont s’enchainer et force est de constater que l’ensemble fonctionne très bien. On est à la fois dans quelque chose de parfois très visuel, et le comique de situation. Le film ne se prend jamais au sérieux, et le running gag de la VHS du nanar King Kong 2 que le personnage de Mark Wahlberg doit rendre à son vidéoclub décoré quasi exclusivement que d’affiches de productions Troma en est l’exemple même. Certes, on ne rit que très rarement aux éclats, mais l’ambiance du film est tellement décontractée qu’on ne peut s’empêcher d’avoir un sourire aux lèvres du début à la fin. Décomplexé, le film l’est aussi dans ses scènes d’action souvent over the top. Kirk Wong s’amuse avec sa caméra, l’ensemble est dynamique, toujours bien lisible, et on sent parfois sa patte hongkongaise dans les gunfights. Certains CGI ont clairement mal vieilli, mais comme le film n’en abuse pas, cela ne joue pas en sa défaveur. Il est clair que The Big Hit ne fait pas dans la finesse et il y a fort à parier que beaucoup n’adhèrent pas au délire (le film n’a pas rencontré un gros succès au box-office). Mais le film est tellement généreux dans ce qu’il propose qu’il serait dommage de bouder son plaisir.
The Big Hit est un très bon divertissement qui ne cherche jamais à aller au-delà de son statut de film pas prise de tête. Le résultat est con comme la lune, mais fun et relativement jouissif.
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