Deuxième long-métrage de la cuvée "Welcome to the Blumhouse" 2021, "Bingo Hell" s'attaque cette fois encore plus directement à la gentrification d'un quartier par un biais horrifique que "Black as Night" en confrontant Lupita, le pilier d'une petite communauté pauvre de retraités, à un mauvais génie venu se substanter des désirs inassouvis des habitants grâce à des parties de bingo démoniaques...
Plus amusant et décomplexé que son prédécesseur, "Bingo Hell" amène son sujet sur le terrain de la farce gore grâce à des excès surréalistes assez jouissifs dans la mise en scène des maléfiques revers de fortune des gagnants au fameux bingo tout en réussissant à conserver le côté attachant de son héroïne âgée mais déterminée pour endiguer la destruction d'une communauté qu'elle chérit telle une famille. À ce jeu, l'actrice mexicaine Adriana Barraza (vue récemment dans "Penny Dreadful: City of Angels") se montre convaincante dans son rôle de petite matronne hispanique qui sait aussi laisser la place à une vraie sensibilité, notamment à travers son amitié pour Yolanda (L. Scott Caldwell) et son regard bienveillant sur les autres résidents, elle sera le seul véritable vecteur d'émotions du film là où les autres échoueront pour la plupart (tout ce qui concerne les personnages plus jeunes aura un mal fou à fonctionner par exemple).
Seulement, au-delà de son héroïne sympathique et de ses envolées gores, "Bingo Hell" donne trop l'impression d'une bonne idée de segment de film à sketchs étirée en long-métrage qui peine à passionner en faisant durer plus que de raison le duel à distance se jouant entre Lupita et les sourires carnassiers de cette bonne vieille trogne de Richard Brake (décidément, si le Diable a un visage humain, ce doit être vraiment le sien). En effet, Gigi Saul Guerrero a beau essayer de ne pas ménager ses efforts derrière la caméra, il faut bien reconnaître que le film se met souvent à patiner dans la gelée verte dès qu'il quitte des yeux l'ambiance extravagante de son bingo ou le sort des pauvres âmes qui ont le malheur d'y participer, corrompues tout autant par les sommes astronomiques qu'on leur fait miroiter que par le rêve de quitter une existence en perdition. D'ailleurs, "Bingo Hell" aura bien du mal à créer le moindre effet de surprise avec son dernier acte à la morale connue par avance et bizarrement moins impressionnant face à la violence grandguignolesque qui a dominé des morts antérieures.
Grâce à quelques sourires en compagnie de Lupita, "Bingo Hell" nous laissera tout de même avec le sentiment d'avoir moins perdu notre temps que devant "Black as Night" mais force est de constater qu'il est encore bien difficile de s'enthousiasmer pour ce deuxième film Blumhouse/Amazon 2021 dont on peine vraiment à sortir un minimum rassasié malgré certaines qualités ou excès venant de sa part.