C’est toujours le même topo, je me lance dans les DTV chinois un peu au hasard, parfois attiré par un acteur que je connais au casting. Pour Black Hunting Operation, arrivé au départ sur la plateforme Tencent Video avant d’atterrir sur iQiYi, c’est parce que Fan Siu-Wong, acteur que j’apprécie particulièrement depuis que je l’ai découvert il y a 30 ans dans Une Flic de Choc puis dans Story of Ricky et autres Ip Man, incarnait le rôle principal du film. A l’instar de Chin Siu-Ho, Fan Siu-Wong n’a pas eu la carrière qu’il méritait et se refait une nouvelle santé dans le DTV chinois du haut de ses 50 ans, enchainant plusieurs films par an (5 en 2022, 6 en 2021, 4 en 2020, …). Certains dirons que ce n’est pas glorieux, mais quand on voit l’état actuel du cinéma de Hong Kong et qu’on est un artiste martial, ce nouveau cinéma chinois pour le web est une bonne solution pour payer ses factures et continuer d’exister cinématographiquement parlant. Surtout que ce Black Hunting Operation, bien qu’il n’invente strictement rien, et un divertissement bien troussé.


Black Hunting Operation, parfois appelé Black Hunting tout court, n’a donc pas inventé la poudre. On constate très rapidement que c’est un film avec un flic infiltré chez les triades comme on en a vu plein à Hong Kong dans les années 2000 après Infernal Affairs (qui a engendré un paquet de rejetons). Il n’est pas difficile de deviner de qui il s’agit et de toutes façons, le pot-aux-roses nous est révélé très rapidement avec le schéma classique des copains des triades qui vont commencer à se méfier. Le réalisateur Wang Kai ne cache à aucun moment ses inspirations avec des moments qui vont justement penser à Infernal Affairs (le corps qui chute sur le toit de la voiture par exemple), d’autres qui vont plus lorgner du côté de la saga Young & Dangerous, et clairement Black Hunting Operation ne cherche jamais à proposer quelque chose de nouveau. C’est un melting poat de tout ce que Hong Kong a déjà fait en termes de triades mais le scénario se tient bien, il est fluide, et il arrive même à tenir en haleine. Bien que ça pompe partout, on sent une réelle envie de proposer un divertissement qui tient la route et qui cherche à être efficace. Tout s’enchaine vite, avec peu de temps mort, mais pas trop vite comme dans des films tels qu’Ace Bodyguard qui, à trop vouloir privilégier l’action, en oubliait son scénario sur le bas-côté. Ici, le spectateur a le temps de respirer car le réalisateur pose son histoire, fait avancer le scénario sans se presser tout en gardant un rythme d’action élevé. Le budget alloué au film semble plutôt confortable pour un film du genre, avec beaucoup de figurants et un côté kitch non présent contrairement à d’autres bobines du genre (à l’exception d’un ou deux fonds verts pourtant évitables). Alors oui, on reste dans de la série B car le film ne cherche jamais à être plus, mais ça a un minimum de gueule.


Wang Kai s’éclate avec sa mise en scène : plans cassés, plongés / contre plongés, travellings aériens, caméra très dynamique lors des scènes d’action, … Esthétiquement, le film s’en sort très bien et on sent que le jeune Wang Kai (36ans à l’heure où j’écris ces lignes) en a un minimum sous le capot (il s’agit ici de son 26ème film). Les scènes d’action valent elle aussi le coup d’œil et dès l’introduction très dynamique impliquant plusieurs dizaines de combattants qui se foutent joyeusement sur la gueule à coups de matraque ou de machettes, on sent qu’on va passer un bon moment. Les scènes de combat vont vite, c’est nerveux, brutal, avec un Fan Siu-Wong qui une fois de plus nous montre l’étendue de ses talents bien qu’on soit ici plus dans du combat de rue bien brutal plutôt que des combats chorégraphiés façon film de kung fu. Les bastons sont plus brutes, à coups de barres de fer, de queues de billards, de bouteilles, de battes de baseball, et le résultat est plutôt violent comparé aux standards du genre en Chine. Le film a un côté sans pitié où tout le monde en prend plein la gueule. Niveau casting, c’est là aussi plutôt agréable avec des acteurs charismatiques et, bien qu’ils forcent parfois un peu trop le trait (le grand méchant par exemple), ils incarnent plutôt bien leurs personnages. Ce casting se compose de bon nombre de têtes bien connues de la population locale, avec notamment les acteurs vétérans Shi Zhao-Qi et Wang Shuang-Bao qui ont une carrière longue comme le bras dans le cinéma et les séries chinoises. Comme très souvent, Black Hunting Operation est un peu plombé par une scène de fin à la gloire du gouvernement (qu’ils sont gentils nos policiers, et vous avez vu, c‘est les plus loyaux). Alors si vous voulez un conseil, regardez le film en zappant cette toute dernière scène, et vous aurez quelque chose qui se rapproche de ce que le cinéma de Hong Kong a fait de plus sympathique en termes de film de triades.


Les DTV chinois recyclent tout ce qui s’est déjà fait dans le cinéma de Hong Kong depuis 50 ans et ce Black Hunting Operation n’échappe pas à la règle en lorgnant du côté des films de triades. Malgré tout, le résultat est étonnamment recommandable.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-black-hunting-operation-de-wang-kai-2023/

cherycok
6
Écrit par

Créée

le 4 oct. 2023

Critique lue 10 fois

cherycok

Écrit par

Critique lue 10 fois

Du même critique

Barbaque
cherycok
4

The Untold Story

Très hypé par la bande annonce qui annonçait une comédie française sortant des sentiers battus, avec un humour noir, méchant, caustique, et même un côté gore et politiquement incorrect, Barbaque...

le 31 janv. 2022

22 j'aime

Journey to the West: Conquering the Demons
cherycok
7

Critique de Journey to the West: Conquering the Demons par cherycok

Cela faisait plus de quatre ans que Stephen Chow avait quasi complètement disparu des écrans, aussi bien en tant qu’acteur que réalisateur. Quatre ans que ses fans attendaient avec impatience son...

le 25 févr. 2013

18 j'aime

9

Avengement
cherycok
7

Critique de Avengement par cherycok

Ceux qui suivent un peu l’actualité de la série B d’action bien burnée, savent que Scott Adkins est depuis quelques années la nouvelle coqueluche des réalisateurs de ce genre de bobines. Mis sur le...

le 3 juil. 2019

17 j'aime

1