Coming out of Africa
Alors qu’on n'attend plus rien du mastodonte Marvel, qui ne cesse de ronronner même dans les supposées nouveautés de sa franchise (les promesses non tenues du deuxième Gardiens de la Galaxie, la...
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Alors qu’on n'attend plus rien du mastodonte Marvel, qui ne cesse de ronronner même dans les supposées nouveautés de sa franchise (les promesses non tenues du deuxième Gardiens de la Galaxie, la paresse de Doctor Strange) Black Panther sonne enfin comme une véritable proposition.
On avait peu à parier sur un super héros en combinaison comme il s’en produit à la chaine, surtout si c’était pour nous servir des poursuites de 4x4 et des cascades au ralenti : 1ère surprise, cette séquence urbaine, bien mise en avant dans la bande annonce, sera en réalité la seule à vraiment jouer du formatage de coutume de la MCU.
Lors de cette scène, un personnage fustige le recours aux fusils mitrailleurs, qualifiant ses adversaires de primitifs : elle est noire, elle est guerrière et use d’une lance. Dans cette petite provocation se loge tout le pari assez audacieux du film : jouer à fond la carte identitaire. Black Panther est un film africain, et non afro-américain, à une scène prés, et un personnage (celui de la sœur, vectrice d’une modernité et d’un humour assez pesant). On ne dilue pas un vague exotisme dans le pré carré du blockbuster, mais on lui donne au contraire sa couleur : costumes, paysages, rites tribaux, dans sorte de Roi Lion revisité chez les hommes : c’est culotté, et souvent tout à fait savoureux.
Car cette question de l’identité irrigue aussi l’intrigue, posant l’épineuse question du statut de l’Afrique à l’échelle internationale : le Wakanda, pays le plus puissant du monde du fait de ses ressources, vit caché : par peur de la convoitise, mais aussi par lucidité quant à la capacité des grandes puissances à le dévaster, comme ils l’ont fait auparavant. Se pose donc le problème de la solidarité avec le reste du continent, et, surtout, des exilés relégués au rang de minorité, notamment aux USA. Même si la morale finit par l’emporter sur un consensus, les motivations de l’antagoniste jettent pour une fois le trouble en évoquant des sujets sensibles comme la colonisation, l’esclavage ou la ghettoïsation des populations noires, sujet on ne peut plus rare dans le blockbuster américain.
Cette identité marquée gagne aussi l’esthétique du film : la réalisation est vive, nerveuse, et se met au diapason de l’énergie déployée. Ryan Coogler s’amuse, suit un ballon de basket avec virtuosité, et nous sert un joli plan séquence lors d’une baston sur deux niveaux qui cite assez clairement Kill Bill tout en lui apportant une patte personnelle. Le formalisme guette un peu (qu’on m’explique l’intérêt de ce plan qui commence à l’envers avant l’accession au trône), et la réalisation accuse quelques faiblesses quand il s’agit de passer à une dimension épique : le champ de bataille, s’il se voit joyeusement malmené par l’irruptions de rhinos de combat, convoque quant à lui les grandes heures du Retour du roi sans véritablement pouvoir rivaliser avec lui.
Mais le recours au montage alterné, notamment dans ce jeu de pilotage virtuel d’un vaisseau, permet une distribution spatiale fragmentée qui rythme bien toute la dernière partie, et excuse les facilités d’un scénario assez balisé sur son dernier tiers.
L’Afrique, les femmes, la fierté : Black Panther ne révolutionne certes pas le genre du blockbuster, mais trouve, dans ses thématiques, la capacité conjointe d’étonner et de réjouir, vertus rarissimes dans le cinéma Hollywoodien. Il y a peu de chances pour que ça dure, alors autant en profiter.
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le 28 févr. 2018
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